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TES, TL
Titre : Socialisme, communisme et syndicalisme en
Allemagne depuis 1875 :
un aspect de l’évolution du mouvement ouvrier européen
On peut définir simplement comme socialistes, toutes les idéologies
visant à améliorer le sort des ouvriers. Ainsi formulé, l’intitulé nous
invite à nous intéresser uniquement au syndicalisme
ouvrier destiné à défendre les
intérêts de ceux qui pour seule richesse ont leur force de travail. Les
socialistes souhaitent également la socialisation des moyens de production
(mutualisation, coopératives, collectivisation, étatisation). Le socialisme
ainsi défini, le communisme
n’apparaît d’abord que comme une
doctrine sociale parmi d’autres. C’est d’ailleurs l’Allemand Karl Marx qui
distingue dans l’évolution vers une société plus juste, deux stades. Le premier
étant celui du socialisme et le
second celui du communisme. Nous les
présenterons plus loin. Cette idéologie comme d’autres doctrines sociales ont
connu une large diffusion en Europe avec le développement du monde
ouvrier dans le contexte de l’industrialisation.
En Allemagne comme dans le reste de l’Europe, la pensée socialiste a été parcourue par de nombreux débats et donc en Allemagne comme ailleurs en Europe, le
socialisme s’est présenté sous différents
visages selon les lieux et les époques.
Problématique :
comment évoluent le socialisme, le communisme et le syndicalisme en Allemagne
depuis 1875 ? Cette évolution est-elle comparable à celle du mouvement
ouvrier en Europe ?
I Dans le contexte de l'industrialisation, l'avènement
de la référence marxiste et de la social-démocratie allemande (1875-1914)
a)
La classe
ouvrière est fille de l’industrialisation en Allemagne comme dans le reste de
l’Europe nord-occidendale.
« La
classe bourgeoise et la classe ouvrière sont les filles d’un même
monde moderne, d’un même système de production et de pensée »
Jean Jaurès, Pour la laïque, 1910
Dans
le courant du 19ème siècle, l’industrialisation
de l’Allemagne est très rapide notamment
dans les régions rhénanes. Si bien qu’en 1913, l’Allemagne peut être considérée
comme la deuxième puissance économique
mondiale. En 1914, ce pays est le premier producteur mondial de matériel
électrique avec 35 % de la production mondiale et le deuxième producteur
d'acier avec un total national de 17 millions de tonnes. Ces richesses sont
produites par des ouvriers qui
représentent alors 40% de la population. C’est donc en Allemagne ou au
Royaume Uni où les ouvriers représentent 46 % de la population active
totale, et non en Russie, qu’on imagine
plutôt la réalisation future d’une révolution
prolétarienne.
b)
Les socialismes
allemands comme leurs homologues européens cherchent donc à améliorer son sort.
Les
premiers socialismes ou socialismes
utopiques sont marqués par une très grande diversité. Leurs
thèses sont relayées en Allemagne par les frères Bauer notamment animateurs du
journal Allgemeine Literatur-Zeitung. C’est
l’Allemand F. Engels grand ami et soutien fidèle de K. Marx (ils ont tous les deux étudié à l’université Humbolt que nous visiterons) qui donne à ces socialismes, un semblant
d’unité en les désignant ainsi de façon péjorative dans un fascicule intitulé Socialisme
utopique et socialisme scientifique (1880).
Les premiers socialismes ont pour point commun de vouloir améliorer le sort des
ouvriers mais ils se distinguent dans toute l’Europe, sur la question du rapport
au politique (faut-il s’engager dans l’action politique pour changer
la société ?), sur celle des moyens à employer pour changer cette
société (révolution, réforme, action violente, grève générale), sur
le type de propriété à mettre en place (collective,
individuelle, mutuelle). Ils n’ont pas également le même point de vue sur l’égalité.
Pour terminer, ils n’ont pas le même rapport à la religion et
n’envisagent pas le même modèle politique. Les enjeux des débats
qui opposent les socialistes au 20ème siècle sont présents dès le 19ème.
L’analyse de Karl Marx se veut, elle, scientifique. Pour Marx, l'histoire s'explique par la lutte des classes. Celle-ci aurait
toujours opposé depuis l’antiquité des classes
dominantes à des classes dominées. Il
souhaite donc une révolution pour
que le prolétariat prenne le pouvoir. Dans un premier temps, un Etat fort
doit permettre d’établir une dictature du prolétariat (phase qualifiée
de socialiste). Puis, dans un second
temps, doit naître une société sans classes et sans État (la véritable phase du
communisme). Les marxistes
souhaitent remplacer la propriété privée par la propriété collective des moyens de production.Cette
socialisation de
l'appareil productif peut passer par l'étatisation ou la collectivisation.Le
marxiste est profondément athée.
C'est ce socialisme que l'on qualifie couramment de communisme.
Progressivement, c’est le marxisme qui devient la référence idéologique de beaucoup de socialistes européens.
Prolétariat : ceux qui
n'ont pour vivre que le travail de leurs mains (dans l'antiquité romaine,
le terme désignait la couche sociale qui n'avait pour toute richesse que ses
enfants. Du latin proles : descendant)
c)
Le mouvement
ouvrier se structure donc.
Les
socialistes sont convaincus de la solidarité qui lie les travailleurs du monde
entier. Ils fondent en 1864, l’Association Internationale des Travailleurs (AIT
ou première internationale). Les
socialistes allemands y sont très influents. Mais elle est dissoute en 1872,
car les anarchistes s’opposent aux marxistes sur l’autorité l’Etat. La deuxième
internationale lui succède en 1889, elle s’inscrit progressivement dans la
logique social-démocrate dont le SPD
allemand offre un bon exemple.
Sous
l’impulsion de Ferdinand Lassalle, à l’occasion du congrès de Gotha en 1875, la fusion d’un Parti Ouvrier Social
Démocrate allemand clairement révolutionnaire
et d’une Association Générale des
Travailleurs Allemands beaucoup plus réformiste aboutit à la création d’un le parti social démocrate allemand. Il est
interdit par le chancelier Allemand Otto Von Bismarck de 1878 à la fin des
années 1880. Il prend ensuite le nom de SPD en 1891. Son discours
est marxiste. Mais en réalité sous l’influence d’Edouard Berstein, il pratique le réformisme considérant qu’il est possible d’améliorer le sort des travailleurs en participant à la démocratie
parlementaire et en modifiant progressivement le système capitaliste. A
titre d’exemple dans le cadre de la deuxième internationale, il s’oppose au
recours à la grève générale. Le SPD
devient rapidement un parti de masse
passant de 400000 adhérents en 1905 à plus d’un million en 1914. Il s’organise avec plusieurs milliers de permanents très bien formés. En 1912,
il obtient 35% des voix aux élections législatives, si bien qu’il s’impose
progressivement comme "le phare du
socialisme européen".
Dans
les entreprises, son action est relayée par un puissant syndicat. En 1890
est fondée l'ADGB (Confédération Générale des Syndicats
Allemands) qui réunit en 1913 2,5 millions d'adhérents soit plus de la moitié
des syndiqués de l’époque. Contrairement
à d’autres syndicats européens de
tradition anarcho-syndicaliste, l’ADGB ne
considère pas la grève générale comme le moyen d’améliorer la condition
ouvrière. Il ne cherche pas à détruire le capitaliste mais plutôt à
l’améliorer. Dès la fin du 19ème siècle, l’influence de la social-démocratie est telle que le chancelier Bismarck
est obligé d’adopter une législation
sociale très en avance sur son temps pour ne pas être débordé. En 1883 est
mise en place une loi sur l’assurance
maladie, en 1884, une loi sur les
accidents du travail, en 1889 une loi
sur la vieillesse et l’invalidité.
Parti de masse : parti ayant vocation à réunir une partie numériquement très représentative de la population au contraire d'un parti élite.
Sociale-démocratie : courant du socialisme inspiré à l'origine
par le marxisme, évoluant ensuite vers le réformisme. La social-démocratie est
en principe attachée à la protection sociale et à la redistribution des
richesses.
II La division du socialisme et du communisme allemands
dans le contexte de l'affrontement des modèles. (1914-1989)
a)
A l’occasion de
la première guerre mondiale, les socialistes se déchirent (1914-1918)
Alors
qu’en France, Jean Jaurès rêve d’une grève générale qui unirait les travailleurs
européens et empêcherait la guerre,
le SPD fait le choix de la guerre.
En 1912, le député SPD Noske déclare que les socialistes Allemands
feront leur devoir militaire. Finalement au moment où débute la guerre en août
1914, les socialistes allemands comme
les socialistes français votent les crédits de guerre. En Allemagne, en
1914, seul le député socialiste Karl Liebknecht vote contre les crédits
de guerre. En mai 1916, il est arrêté pour avoir crié « A bas la
guerre » à l’occasion. Il faut dire que le pacifisme progresse et que les
sociaux démocrates se divisent sur la question de la poursuite de la
guerre. En 1917 des grèves ouvrières éclatent en Allemagne. 300 000
ouvriers font grève à Berlin. En 1918, ils sont 500 000 dans le domaine de
l’armement à débrayer. Il faut dire que
la même année éclate en Russie une
double révolution. La première fait chuter le tsar. Par la seconde, les bolcheviks d’inspiration marxiste
s’emparent du pouvoir. L’Allemagne aurait pu connaître le même processus
puisque l’empereur Guillaume II est amené à quitter le pouvoir à la fin de la
guerre. Le 9 novembre la République est proclamée. Elle deviendra par la suite
la République de Weimar. Mais,
autour de Karl Liebknecht, de Rosa Luxemburg, les spartakistes issus de l’USPD pensent venue l’heure d’établir une République des Conseils. Ils
engagent donc à Berlin un processus
révolutionnaire. Mais celui-ci est sévèrement réprimé par les corps francs pour le compte du
gouvernement SPD d’Ebert et de Noske au cours de la «semaine sanglante » du 6 au 13
janvier 1919. Socio-démocrates et révolutionnaires marxistes sont donc
désormais des ennemis irréconciliables. En France en 1920 également le parti
socialiste crée en 1905 sous le sigle SFIO (Section Française de
l’Internationale Ouvrière) se divise pour donner naissance à la SFIO d’une part
(parti socialiste) et à la SFIC d’autre
part (Parti communiste). Le parti communiste français comme le Parti Communiste
Allemand (KAPD puis KPD) adhèrent à l’Internationale
communiste créée en 1919. Il s’agit de la troisième internationale appelée
également Komintern.
Corps francs :
Freikorps, milices constituées le plus souvent d’anciens combattants de la
première guerre mondiale.
Spartakistes :
mouvement révolutionnaire d’inspiration marxiste crée en 1917. Au sortir de la première
guerre mondiale, il tente d’établir une « République des Conseils ».
b)
C'est divisés
qu'ils font face au nazisme et qu'ils en subissent la répression (1919-1945).
« Le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête
immonde » Bertold Brecht-La résistible
ascension d’Arturo Ui
Dans
le cadre de la République de Weimar,
le SPD s’affaiblit progressivement. La répression du mouvement spartakiste, lui est reprochée par les
socialistes révolutionnaires. Les nationalistes lui reprochent d’avoir
accepté les conditions du « diktat » de Versailles. Il
est ensuite confronté à la gestion de la crise
inflationniste des années 20. A Berlin en 1923, la miche de pain coût
plusieurs milliards de Reichsmarks. Il subit ensuite la grande dépression des années
30 au cours de laquelle le nombre de
chômeurs atteint les 6 millions.
Sous
l’influence de Staline à partir de 1923, le Komintern, selon la tactique « classe contre classe », fait
des socio-démocrates les adversaires prioritaires des communistes. Le KPD
contribue donc, comme les Nazis à la déstabilisation
de la vie politique allemande. En 1925, ils maintiennent un candidat aux
élections présidentielles et permettent
ainsi l’accession au pouvoir du conservateur Hindenburg. Celui-là même
qui en janvier 1933 fait appel à Hitler
en prétendant contrer la montée communistes. Hitler prend d’ailleurs le
prétexte de l’incendie du en février 1933 Reichstag par un jeune déséquilibré
sympathisant communiste pour réprimer
les communistes, les socio-démocrates et les syndicalistes. Le KPD et le
SPD comme tous les partis non nazis sont successivement interdits avant la loi
du 14 juillet 1933 établissant le
système du parti unique au bénéfice du Parti National Socialiste des
Travailleurs Allemands (NSDAP =
Nazis). Les communistes et les socio-démocrates sont donc les premiers envoyés
dans les camps de concentration
ouverts à partir de 1933. Dans la clandestinité, quelques uns d’entre eux
animent la résistance allemande. C’est le cas du groupe de Josef Römer.
c)
Dans le
contexte de la guerre froide, deux modèles s’opposent, l’ « économie
sociale de marché » et le "socialisme réél".
"Tout doit avoir l'air démocratique mais nous
devons tout avoir entre les mains" Walter Ulbricht
"J'apprends que le gouvernement estime que le
peuple à 'trahi la confiance du régime' et 'devra travailler dur pour regagner
la confiance des autorités'. A ce stade, ne serait-il plus simple de dissoudre
le peuple et d'en élire un autre?" Attribué à Berthold Brecht
critiquant le gouvernement de RDA
Dans
la zone contrôlée par les soviétiques
dans le cadre de l’occupation de
l’Allemagne après la seconde guerre mondiale, les communistes deviennent très influents.
Des hommes proches des soviétiques comme
Walter Ulbricht sont placés aux postes clé de l'administration.
Les autres partis politiques reprennent leurs activités mais en avril 46,
l’aile gauche du SPD et les communistes
du KPD fusionnent pour former le Parti Socialiste Unifié d'Allemagne (SED).
En
1949, à l’issue de la crise de Berlin,
l’Allemagne est divisée entre la République Fédérale Allemande (RFA)
pro-occidentale à l’ouest et la République
Démocratique Allemande (RDA) prosoviétique à l’est. Pendant 40 ans, la
situation est celle d’ "un peuple [partagé entre] deux Etats".
En
RDA, une démocratie populaire
est établie sur le modèle soviétique. Si les autres partis poursuivent leur existence,
le pays est dominé par le SED grâce
au système de liste unique qui
permet de désigner les membres de la chambre
du peuple (volkskammer-Palais du Peuple désormais
détruit remplacé à l’avenir par le château de Berlin reconstruit après une
longue contreverse). C’est elle qui désigne le conseil d’Etat et son président. Il convient de souligner ici
qu’à partir de 1960, Walter
Ulbricht est à la fois président du
conseil d’Etat et secrétaire général du SED. En 1952, les länder
est-allemands disparaissent. Le pays est
donc très centralisé. La Stasi,
police politique réprime l’opposition et surveille la population (film….).
Le système éducatif cherche à faire des
hommes et des femmes nouvelles (pionniers). Politiquement, on peut donc
parler de totalitarisme. Les moyens de production sont collectivisés
et l’économie est planifiée. La RDA se présente alors comme le pays du
« socialisme réel » et comme
un modèle du bloc soviétique. Il
convient de noter cependant qu’avec un Etat qui demeure fort elle ne connait pas le véritable stade du communisme. Par
ailleurs, le SED se coupe progressivement de ses bases ouvrières. En 1953, à
Berlin une manifestation ouvrière contre
les exigences de rendement pour atteindre les objectifs est sévèrement réprimée par les autorités.
Le bilan est d’une centaine de morts et de 40 condamnations à mort. La fuite des allemands de l’est vers l’ouest montre également les limites du système. Le mur de Berlin est donc érigé en août
1961.
Nous nous rendrons à Schöneberg
où J.F. Kennedy prononça son célèbre discours :
En
RFA, la constitution de 1949 établit
un système fédéral où à coté du Bundestag (parlement), les länder sont
représentés au Bundesrat. Tout est
fait pour empêcher la mise en place
d’un exécutif exagérément puissant. Le
rôle du président de la République est honorifique. Le chancelier est élu
par le Bundestag. La dissolution du Bundestag
est quasi impossible. Le système politique allemand est d’abord dominé par la
CDU de Konrad Adenauer. Son ministre de l’économie Ludwig Erhard
établit le concept d’économie sociale de marché (sozialmarktwirtschaft).
Il s’agit de concilier libéralisme
économique, intervention de l’Etat
et haut niveau de protection sociale.
Des négociations avec des syndicats très
représentatifs (IG Metall) du monde des
travailleurs permettent de désamorcer
les conflits sociaux dans le cadre d’une forme de cogestion dans le cadre
de la loi de 1951 sur les relations professionnelles. Ce modèle apparaît alors
comme un modèle alternatif au
capitalisme et au communisme. Dans le même temps, le SPD abandonne en 1959,
toute référence au marxisme dans son programme de Bad Godesberg. Pendant ce
temps, se développe une extrême gauche
radicale soutenue par la RDA et pratiquant le terrorisme. C’est à ce moment là que la Fraction Armée Rouge (Andres Baader, Ulrich Meinhof) surnommée bande à Baader commet des
attentats. La sociale démocratie Allemande connaît son apogée, avec l’arrivée au
poste de chancelier du SPD Willy Brandt. Son parti compte alors un
million d’adhérents. Willy Brandt se
rapproche de la RDA en proposant l’Ostpolitik.
Son homologue en RDA est depuis 1971, Enrich
Honecker du SED. C’est ce dernier qui doit gérer le début de la crise qui
mène la chute du mur de Berlin.
Démocratie populaire : régime où il n'existe qu'un
parti, le parti communiste qui représente la classe ouvrière et par extension
le peuple.
Totalitarisme : régime basé sur une idéologie dominante, un parti
unique, la dictature d'un dirigeant, une police imposant la terreur, un
monopole des moyens de communication, un monopole de la force armée et une
direction de l’économie par l'Etat. Le totalitarismes ont la prétention de
créer une société nouvelle.
Ostpolitik : politique menée par
le chancelier Willy Brandt qui aboutit à la
reconnaissance mutuelle des deux Allemagnes en 1970.
Cogestion : participation associée des représentants des
travailleurs et des employeurs à la gestion des entreprises et de l’économie.
III Que
deviennent le socialisme et le communisme allemands quand la chute du
mur de Berlin coïncide avec l'accélération de la mondialisation ? (1989-2014)
a)
Avec la chute
du mur le communisme ne peut plus être stalinien.
" La liberté c'est aussi la liberté de penser
autrement !" Rosa Luxemburg. Slogan repris par les manifestants de RDA en
1989
L’arrivée
en 1985 d’un réformiste Mikhaïl Gorbatchev à la tête de l’URSS change la
situation en RDA. M. Gorbatchev annonce aux dirigeants des démocraties
populaires que l’URSS n’interviendra
plus dans les affaires intérieures de leurs pays. En 1989 les
manifestations se multiplient notamment à Dresde et à Leipzig (Montagsdemo-Manifestations du lundi). En mai 1989, la Hongrie est le premier pays de
l’est à ouvrir ses frontières à l’ouest.
Les allemands de l’est en profitent pour passer à l’ouest. Les autorités
est-allemandes peinent à empêcher ces départs. Egon Krentz remplace E. Honecker à la tête du
pouvoir mais les manifestations ne cessent pas. Le 9 novembre, les autorités sont amenées à accepter que des visas de sortie soient attribués aux
allemands de l’est même pour Berlin. Politiquement, cela signifie que le mur n’a plus de raison d’être.
Concrètement, les premiers coups de
marteau lui sont donnés. Le chancelier CDU Helmut Kohl parvient à
imposer aux Allemands et au reste de l’Europe le principe de la réunification allemande. Elle intervient le 3 octobre 1990. Dans l’Allemagne
réunifiée le SED ne peut se maintenir
comme un parti attaché aux principes de la RDA. Il change de nom et de
programme et devient le PDS (Parti
du Socialisme Démocratique). Il s’oppose désormais au démantèlement de la
protection sociale et au recul des droits sociaux. Il défend également les
intérêts des länder de l'est. Il n’est pas le seul parti en Europe à changer de
nom dans ce contexte de fin de la guerre froide. En 2007, le Parti Communiste
italien se fondait dans le Parti Démocratique italien.
b)
Le SPD lui
accepte les principes du libéralisme
Comme
d’autres partis socialistes européens dans le contexte de la mondialisation concurrentielle, le SPD
s’éloigne des références au marxisme et amorce un tournant social libéral. Aux élections de 1998, il développe le thème du Neue Mitte (nouveau
centre). Lors de son deuxième mandat de chancelier le SPD Gerhardt Schröder
fait voter la loi Hartz IV qui réduit les indemnités pour les chômeurs de longue durée afin de les
inciter à trouver un travail. En
Europe, c’est le Labour britannique
qui opère ce virage le premier. Le blairisme, du nom
du premier ministre travailliste Tony Blair, s’éloigne des principes de l’Etat providence d’après guerre pour obliger les chômeurs à
chercher un emploi en échange de
prestations sociales. Désormais beaucoup de partis socialistes européens
abandonnent l’idée que l’Etat puisse
intervenir dans l’économie. Depuis 2018, c'est une femme Andrea Nahles qui dirige le SPD.
c)
Dans ces
conditions, une alternative socialiste est-elle alors possible ?
Mais
tous les socialistes n’acceptent pas
cette évolution. C’est le cas du SPD Oskar Lafontaine. Partisan
d’une politique Keynésienne, il
démissionne de la présidence du parti pour protester contre la politique menée
par un autre SPD Gerhardt Schröder. Il fonde avec d’autres socialistes
et des communistes du PDS, le parti Die
Linke (la Gauche). Ce parti a un programme antilibéral et social démocrate.
En Europe, il est la référence du Front
de Gauche de Jean-Luc Mélenchon.
Politique keynésienne : politique considérant que la production peut être relancée par
l’Etat s’impliquant notamment dans le soutien à la consommation.
Conclusion : Il n’ya
pas un, mais des socialismes. Dans son histoire depuis 1875, l’Allemagne
ne déroge pas à la règle. Face aux
socialismes utopiques, le SPD s’impose assez rapidement comme référence du
socialisme européen. Cependant dès les origines, ce parti est traversé par des
querelles qui opposent les réformistes aux révolutionnaires d’inspiration
marxiste. Quelques voix discordantes ne l’empêchent pas de se rallier à la guerre.
Mais a l’issue de ce conflit, comme ailleurs en Europe, la gauche allemande se
déchire. Dans l’entre deux guerres, cette situation fait les affaires des nazis
dont l’idéologie composite est, avant tout, nationaliste, antisémite et
anticommuniste. Sévèrement réprimés sous le totalitarisme nazi, les socialistes
et les communistes reprennent leurs activités dans l’Allemagne occupée de
l’après guerre. Mais, le pays est ensuite divisé à l’issue de la crise de
Berlin. Il est le reflet de la division de l’Europe dans un monde désormais
bipolaire. Alors que la démocratie
populaire de RDA prétend incarner le socialisme réel, le SPD participe au
modèle ouest-allemand de l’économie sociale de marché. Des syndicats co-gestionnaires y jouent un rôle important. Finalement,
c’est le mur de Berlin qui s’écroule en 1989
et avec lui le bloc communiste qui se disloque. Dans ces conditions, le
Parti Communiste est-allemand change de nom, tandis que le SPD ouest-allemand
change de référence idéologique. Comme dans d’autres pays d’Europe, ceux qui
restent attachés à défendre les travailleurs face aux intérêts du capitalisme
financier et aux excès de la mondialisation ultra-concurrentielle sont
désormais minoritaires.
Auteur :
Nérée Manuel
Bibliographie :
CONORD F., Les gauches européennes au XXème siècle,
Armand Colin, 2012. [CDI]
BOGDAN H., Histoire de l'Allemagne, de la Germanie à
nos jours, Tempus, Perrin, 2003.[CDI]
BRAND D., DUROUSSET M., Dictionnaire thématique Histoire et
Géographie, SIREY, 1995.
Dernière mise à jour : 04-18