L'Historien et les mémoires de la guerre d'Algérie

Module pédagogique optionnel : les mémoires de la guerre d'Algérie

Un lieu, un témoin, un document


LES COMBATTANTS

Cette séquence peut notamment être réalisée devant le Mémorial Gersois des Anciens Combattants et Victimes Civiles d'Afrique du Nord à Pavie.


Document 1 :

"Nous partons de Versailles pour Marseille le 28 décembre 1958. A la gare quelques civils manifestaient bruyamment. Ne partez pas, refusez cette guerre, L'Algérie aux Algériens, désertez ... Les plus furieux bousculaient le service d'ordre faisant même le coup de poing... Allez grouillez-vous hurlait notre encadrement, ne les écoutez pas, ce sont des communistes...Ils déshonorent la France. [...]


Nous débarquons du Ville de Tunis le 1er janvier 1959 au petit jour. Nous rêvons de notre terre natale, de bals, de filles. J'ai en mémoire les vagues énormes que j'ai photographiées avec un ami. Une fois débarqués, direction la gare. Nous sommes entassés dans un vulgaire "teuf-teuf". Plus vers le sud, semblable à ceux que nous ont fait aimer les cinéastes du Far-West, un authentique tortillard prendra la relève. [...]


Nous voici à Saïda, porte du désert, siège du 8ème RIM (Régiment d'Infanterie Motorisé). Nous sommes consignés pendant plusieurs jours, couchant sur des litières de paille, sous les guitounes. Quatre occupations principales : ranger notre barda, coincer la bulle, écrire à la famille, garder des prisonniers algériens, hommes muets qui chargent et déchargent des camions à longueur de journée sous un soleil de plomb." [...]


Je connaissais chaque prisonnier, mais avec des différences au niveau du contact. Je me souviens parfaitement d'Abdelnouar, particulièrement...Après des mois de cache-cache avec nos compagnies, il avait fini par être capturé dans un champs d'alfa ... Je fus le seul à le fréquenter et à découvrir, stupéfait, son étonnante loyauté ... Il avait choisi sa vie, il avait perdu, il paierait ... Il attendait sereinement le dénouement ... Quelques soirs deux ou trois (?) Je lui ai porté son repas. Et tout de suite nous avons parlé. Plus grand et plus costaud que moi, il aurait pu me bousculer et fuir. Y avait-il seulement pensé ? Je ne crois pas.... Et sa parole était si poignante que je me demandais parfois qui était le plus malheureux des deux et qui était le véritable prisonnier.

L'avant dernier soir de son emprisonnement, Abdelnouar me dit : "Je vais mourir bientôt. Ils vont me fusiller. Il faut que tu me portes un rasoir. Je veux mourir propre. " Or il n'y avait pas de prise de courant dans la cellule. Je ne pouvais donc lui prêter qu'un rasoir à lame...Au risque de se suicider ou de m'agresser ...Insupportable dilemme...Lui ai-je laissé le rasoir toute la nuit ou s'est-il rasé devant moi ? Voilà une question sans réponse dans mes souvenirs. Ce dont je me souviens c'est d'avoir revu Abdelnouar souriant et... proprement rasé ...Il m'a rendu le rasoir et chaleureusement serré la main ...Nous étions tous les deux très émus... Le lendemain sa cellule était vide. "



alfa : plate servant à faire du papier.

Guitoune : abri rudimentaire.

Barda : bagage du soldat.


Présentation du document.

Titre :

Auteur (nom et fonction) :

Destinataires :

Nature du document :

Date :

Contexte :

Questions.

Dans quelles circonstances, Jacques Faget se retrouve-t-il en Algérie ?



Dans ce témoignage, quelles sont les formes prises par l'engagement des soldats de l'armée française en opération en Algérie?



Quelles sont par ailleurs les occupations des soldats de l'armée française ?



Expliquez les circonstances de la disparition du prisonnier prénommé Abdelnouar ?



Qu'est ce que ce document dit de la particularité de la guerre en Algérie ?


Pourquoi peut-on dire que la guerre d'Algérie a aussi opposé des français entre eux ?