De 1948 à nos jours : le projet européen et les étapes de sa réalisation.

 

L'Union européenne est actuellement touchée par une vague d'euroscepticisme. En 2016, les Britanniques se sont prononcés par référendum pour la sortie de l'Ue. En Pologne, en Hongrie, en Autriche et même en France et en Allemagne, les discours hostiles à l'intégration européenne se développent. Pourtant, les intentions de ce projet politique dès l'origine sont louables. Il s'agit d'établir durablement la paix sur le continent.

 

En quoi consiste le projet européen ? Quelles sont les étapes de sa réalisation ? Ses objectifs ont-ils été atteints ?

 

I 1948-1950 : Les objectifs de la construction européenne…

a)…sont politiques…

En 1948, à La Haye aux Pays-Bas,  un congrès réunit plus de 700 représentants de plusieurs Etats européens. Ces derniers souhaitent unir les peuples d’Europe autour d’une paix durable. Cette volonté est confirmée en 1950, dans une déclaration rédigée avec Jean Monnet le ministre des affaires étrangères français Robert Schuman, envisage la création d’une fédération. A ce sujet certains considèrent que les Etats doivent rester souverains autour d’un projet commun (confédération), d’autres pensent qu’il faut créer un Etat fédéral comme aux Etats-Unis avec des Etats autonomes mais soumis dans certains domaine à un Etat fédéral (système fédéral).

 

Système fédéral : c’est sur un territoire défini, la superposition de deux niveaux de pouvoir. Les Etats réunis possèdent une assez grande autonomie (justice, éducation). L’Etat fédéral détient lui des pouvoirs importants délégués par les Etats fédérés (défense, diplomatie, monnaie).

 

Confédération : ensemble permanent d’Etats ayant des objectifs communs mais dont les états membres restent souverains et autonomes.

 

Schéma fédération/confédération

 

b)     …et économiques.

Pour établir la paix, dans leur déclaration du 9 mai 1950, Robert Schuman et Jean Monnet envisagent de mettre en commun les productions de charbon et d’acier de la France, de l’Allemagne, du Luxembourg, des Pays-Bas, de l’Italie et de la Belgique.

 

II  Les étapes de la construction européenne.

a)             1951-1989 : vers l’Europe des 12 dans le contexte de la guerre froide.

En 1951, nait la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier). En 1957, le traité de Rome met en place un marché commun, la CEE (Communauté économique européenne). En 1968, elle devient une véritable union douanière. L’intégration politique reste alors limitée. Par exemple, le projet de CED (Communauté Européenne de défense) échoue en 1954 face à l’opposition en France des communistes et des gaullistes soucieux de maintenir la souveraineté de la France. Dans ce contexte, la PAC (Politique Agricole Commune) est mise en place en 1961. Mais la CEE s’agrandit. En 1972, le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande entrent dans la CEE. En 1981, ils sont rejoints par la Grèce puis par l’Espagne et le Portugal en 1986. Politiquement également, l’intégration se poursuit puisqu’à partir de 1979, le Parlement européen est élu au suffrage universel.

 

Souveraineté : caractère d’un Etat qui n’est soumis à aucun autre Etat.

Marché commun : non donné à l’Union douanière de la CEE.

Union douanière : zone de libre échange tarif extérieur commun

Marché unique : Union douanière avec libre circulation des hommes et des capitaux

 

b)             1990-2007 : la poursuite de l’intégration et de l’élargissement.

La chute du bloc communiste rend possible un élargissement de ‘l’Union européenne. Dès 1990, en réalisant son unification, l’Allemagne rattache des länder qui constituaient la RDA à l’Ue. En 1995, trois pays « neutres » dans le contexte de la guerre froide intègrent l’Union européenne : la Finlande, l’Autriche, la Suède. En 2004, 10 pays  la rejoignent: Estonie, Lituanie, Lettonie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Chypre, Malte. En 2007, c’est au tour de la Roumanie et de la Bulgarie.

 

L’intégration politique et économique se poursuit. En 1992 est adopté le traité de Maastricht. En 1999, la monnaie unique, l’Euro, est créée. Elle est mise en circulation en 2002 dans 12 pays (20 désormais). La  Banque centrale européenne (BCE) est établie.  Les accords de Schengen rentrent en vigueur en 1995 (27 Etats membres aujourd’hui). Ils permettent une libre circulation des personnes entre les pays membres et un renforcement des contrôles aux frontières extérieures (26 Etats membres). La politique agricole commune est réorientée pour devenir moins productiviste et plus conforme au principe de développement durable.

 

Dans le domaine politique, le traité de  Maastricht élargit les compétences de l’Union européenne. Mais une fédération n’est pas pour autant créée. Certes, les Etats se soumettent aux décisions communautaires dans certains domaines (commerce, monnaie, agriculture, la  pêche, le  transport). Mais des domaines importants comme la politique étrangère ou la défense échappent encore à la supranationalité malgré le projet d’une PESC (politique étrangère et de sécurité commune)

 

Conseil européen : sommet des chefs d’Etats ou de gouvernements des Etats membres de l’Union européenne. Il représente les Etats membres.

 

Intégration : processus d’harmonisation des normes économiques et sociales et d’ouverture des marchés dans une organisation économique.

 

Parlement européen : il représente les citoyens européens. Il comprend 751 députés. Aujourd’hui,  il a un rôle de codécision, de contrôle et d’avis.

 

III Les enjeux de l’Union européenne d’aujourd’hui. 2005-nos jours  

a)             Les choix pour l’Europe d’aujourd’hui.

En 2005, le débat sur le traité constitutionnel (TCE)  fait ressurgir plusieurs questions : L’Europe doit-elle être plus fédérale ? Doit-elle être une organisation à géométrie variable ? Doit-elle être plus libérale ? Les Néerlandais et les Français se prononcent contre le projet proposé. Finalement, le traité de Lisbonne, dit « traité simplifié » est adopté le 13 décembre 2007. Le pouvoir de codécision du Parlement européen est élargi à de nouvelles questions (justice, affaires intérieures), les européens ont désormais un droit d’initiative populaire. Au niveau du Conseil de l’Union européenne, un plus grand nombre de décisions sont adoptées à la double majorité qualifiée (55% des Etats, 65% de la population). Un président du Conseil européen est désigné pour deux ans et demi renouvelables une fois. Un haut-représentant pour la politique étrangère, sorte de ministre des affaires étrangères est nommé. Enfin, la charte européenne des droits de l’Homme a une valeur juridique contraignante. Cependant, l’Union européenne n’est toujours pas un système fédéral complet et la question du système politique à mettre en place reste ouverte. Pour l’instant, l’Union européenne reste une fédération d’Etats-nations (expression de Jacques Delors).

 

b)             Les interrogations de l’Europe d’aujourd’hui.

 

En 2015, la crise liée à la question migratoire a démontré que les pays membres de l’Ue étaient divisés sur cette question notamment parce que les accords de Dublin mettent les Etats du Sud de l’Ue en première ligne pour gérer l’arrivée des réfugiés.

Cette situation contribue à la montée de l’euroscepticisme. C’est le cas en Hongrie ou encore en Pologne. Dans ces conditions, l’Ue a connu en 2016 une crise majeure avec le référendum sur Brexit à la suite duquel le Royaume-Uni est sorti de l’Ue en 2020. Aujourd’hui, c’est l’élargissement de l’Ue qui pose question dans un contexte géopolitique tendu. Le dernier Etat à intégrer l'Union européenne est la Croatie en 2013. La candidature de 8 Etats est désormais validée par les 27 Etats membres. Il s’agit de l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Kosovo, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie, la Turquie et l’Ukraine. Il faut ajouter à cette liste la Géorgie et la Moldavie qui aimeraient bine intégrer l’Ue. Mais certaines de ces candidatures posent des problèmes géopolitiques majeurs. L’Ukraine est en guerre contre la Russie. La Moldavie et la Géorgie pourraient être à leur tour menacées et l’indépendance du Kosovo n’est pas reconnue par la Serbie.

 

Schéma simplifié des institutions européennes.

 

Confédération d’Etats : certains domaines sont de la responsabilité européenne d’autres des Etats.

 

Supranationalité : principe qui caractérise une organisation placée au dessus des institutions nationales et dont les décisions s’imposent aux Etats membres.

 

Souverainistes : partisan de la défense de la souveraineté nationale, de la compétence des Etats.

 

Conseil de l’Union européenne : Appelé également conseil des ministres, il réunit les ministres concernés par les questions traitées. Il détient un pouvoir de codécision. Il représente les gouvernements des Etats membres.

 

Commission européenne : elle est à l’initiative des directives européennes. A ce titre elle a un pouvoir de codécision. Elle fait également fonctionner les institutions européennes. Son pouvoir est donc également exécutif.

 

Conclusion : Même si les processus d’intégration, d’approfondissement et d’élargissement sont très avancés, se posent encore un certain nombre de questions présentes dès le début de la construction européenne. Robert Schuman et Jean Monnet parlaient souvent d’Etats-Unis d’Europe. On constate, dans le contexte des élections européennes à venir, que le sujet divise encore les tenants d’une Europe fédérale et les partisans du maintien des souverainetés nationales. Pour l’instant l’Union européenne n’est pas un système fédéral complet. La guerre froide est terminée pourtant l’extension d’une Europe)  vers l’est suscite quelques interrogations à l’heure de la guerre en Ukraine. Face au pessimisme et aux doutes, un constat s’impose cependant : depuis 1948, l’objectif politique affiché pour la construction de l’Union européenne est atteint. Les Etats membres sont en paix.