Séries : 1L, 1ES, 1S.

 

Titre : Après l’affrontement bipolaire de la guerre froide, le monde depuis 1991 : paix ou nouvelles conflictualités ?

Un conflit armé (la guerre du Golfe 1990-1991) ; un lieu (Sarajevo 1992-1995) ; un acte terroriste (le 11 septembre 2001)

 

La guerre froide était un conflit idéologique qui opposait sans affrontement direct deux superpuissances. En 1989-1991, la fin de cette période marquée par la menace permanente d’une destruction nucléaire correspond-elle à l’avènement d’un monde de paix, où les peuples cesseraient de s’armer et de s’affronter ?

 

Problématique : La guerre froide cède-t-elle la place à un monde pacifié ? De nouveaux conflits apparaissent-ils ? Pour quelles raisons ? Peut-on affirmer que les religions les expliquent ?

 

Guerre : lutte entre deux ou plusieurs peuples ou pays en armes (on admet que la guerre oppose deux partis de forces relativement égales).

Superpuissance : Etat qui combine tous ces critères pour affirmer son influence partout dans le monde (Etats-Unis et URSS pendant la guerre froide).

Hyperpuissance : puissance sans rivale, capable d’affirmer sa domination sans partage.

Equilibre de la terreur : principe selon lequel aucun belligérant de la guerre froide n’a intérêt à utiliser la bombe compte tenu de la certitude d’être détruit à son tour. 

 

I 1990-2001 : le temps d’une pax americana est-il advenu ? 

a)     Le  « nouvel ordre mondial »….

 

Le 11 septembre 1990, Georges Bush père annonce l'instauration d'un nouvel ordre mondial ( New World Order). Il désigne ainsi la mise en place d’un monde de paix et d'harmonie dont les EU seraient plus ou moins les garants.

 

b)     ,… nait paradoxalement avec la deuxième guerre du golfe.

 

Le contexte semble alors lui donner raison. En août 1990, l’Irak sorti exsangue de la première guerre du golfe (1980-1988) attaque le Koweït voisin. Il faut dire que Saddam Hussein convoite ses ressources pétrolières. Il lui reproche également d’inonder le marché de ses exportations et de tirer  ainsi le prix du baril à la baisse.  Se forme  alors une vaste coalition autour des EU. La France par exemple participe à cette intervention, mandatée par l’ONU. En janvier 1991, débute  la guerre du golfe, deuxième du nom. Pour les EU, la tentation d’une hégémonie est grande. Certains politologues développent alors la « théorie de l’empire global » selon laquelle l’ordre mondial pourrait être administré de façon unilatérale par « l’Amérique ».

 

c)     …Ce conflit alimente l’hostilité néo-fondamentaliste et ….

 

A l’occasion de la deuxième guerre du golfe, le roi d’Arabie Saoudite obtient des dignitaires religieux une fatwa autorisant la présence de troupes infidèles en terre sainte  pour permettre l’installation des forces de la coalition. Cette guerre est un moment de rupture entre les autorités saoudiennes et Ben Laden qui développe alors un discours néo-fondamentaliste de rejet de l'occident incarné par les États-Unis et de dénonciation des monarchies pétrolières. L’intervention s’achève à la fin du mois de février 1991 mais…

 

Fatwa : décision à vocation  juridique prise par une autorité religieuse islamique.

Néo-fondamentalisme : le fondamentalisme désigne la volonté de revenir aux textes fondateurs de l'islam, le néo-fondamentalisme associe à ce principe le rejet de l'occident incarné par les États-Unis et sur une mise en accusation des monarchies pétrolière

 

d)     … de nouveaux affrontements compromettent les espoirs d’une paix mondiale.

 

Dans le contexte de la guerre froide, un certain nombre de revendications nationalistes et de tensions identitaires étaient gelées. Après la mort de Tito, dans le courant des années 80, on assiste à un regain des mouvements nationalistes. Tour à tour,  la Slovénie, la Croatie, la Macédoine (1991), puis la Bosnie (1992) proclament leur indépendance. La Serbie ne l’accepte pas au nom d’une grande Serbie. La guerre est déclenchée en 1991. L’union européenne se révèle incapable d’intervenir directement dans ce conflit situé pourtant dans sa périphérie proche. Les Européens sont divisés sur la question. La France tarde à condamner la Serbie tandis que l’Allemagne veut soutenir la Slovénie et la Croatie. En 1992, l’ONU essaye  de faire respecter un cesser le Feu et envoie la FORPRONU pour protéger la population. Mais cela n’empêche  pas les Serbes de procéder à un nettoyage ethnique comme à Srebrenica en juillet 1995.  L’impuissance de l’UE et de l’ONU  rend nécessaire l’intervention de l’OTAN dès 1993. Les forces de l’OTAN finissent par bombarder les positions  serbes.  Les présidents serbe, croate et bosniaque sont finalement obligés de signer aux Etats-Unis les accords de Dayton en décembre 1995.  Il faudra une nouvelle intervention de l’OTAN au Kosovo en 1999 pour empêcher qu’un nouveau nettoyage ethnique soit perpétré par les Serbes.

A la même époque, l’Europe n’a pas le monopole des conflits ethniques ou de nationalités, puisqu’en Afrique à lieu en 1994, le génocide du Rwanda dont furent victimes des tutsis mais aussi des hutus considérés comme modérés.

Face à tous ces crimes commis se développent  les notions de droit puis de devoir d’ingérence.

 

FORPRONU : Force de protection des Nations Unies pour l’Ex-Yougoslavie. Déployée d’abord en Croatie, elle est composée de casques bleus dont la mission s’étend ensuite à la Bosnie.

Nettoyage ethnique : procédé destiné à chasser une population d’un territoire en la terrorisant (pillage, destructions, massacres et viols)

Accords de Dayton : Ces accords signés en décembre 1995, définissent deux entités distinctes l’une Serbe (République Serbe de Bosnie) et l’autre croato-musulmane (Fédération Croato-Musulmane).

Droit d’ingérence : dans un contexte d’urgence, droit pour un état de venir en aide à des personnes ou des populations menacées dans un autre état en violation du principe de souveraineté nationale.

Devoir d’ingérence : obligation faite à un état de fournir son aide en cas d’urgence humanitaire. 

 

e)     Le choc des civilisations peut-il expliquer cette instabilité nouvelle ?

En 1996, le politologue américain Samuel P. Huntington avance la théorie selon laquelle les relations internationales s'expliqueraient d'abord par les oppositions entre 9 grands modèles sociétaux. Pour lui, depuis la fin de la guerre froide, les sociétés se distinguent moins par leurs idéologies que par leurs cultures. Réduisant parfois les civilisations aux religions, il considère que celles-ci ont des évolutions démographiques divergentes et qu’elles sont amenées à s’affronter. Cette théorie a été accueillie favorablement par les néoconservateurs particulièrement influents dans l’administration Bush (discours sur les axes du bien et du mal, vocabulaire de la croisade).Elle a été également été très bien accueillie par les milieux islamistes qui y ont trouvé là une légitimation supplémentaire de leur jihad contre l’occident judéo-chrétien, pervers et décadent.

Cependant, cette théorie est contestable pour plusieurs raisons :

Elle réduit la définition des civilisations aux religions et elle néglige l'aspect mouvant et perméable des cultures mondiales.

Elle prétend homogènes des aires de civilisations qui en réalité ne le sont pas.

Elle néglige la sécularisation des sociétés particulièrement forte en Europe, par exemple.

Elle couvre d’un vernis religieux des conflits dont les enjeux sont avant tout économiques et politiques.

Elle rend plus difficile le dialogue entre les communautés en les dressant les unes contre les autres.

Elle assimile des populations entières aux préoccupations et aux agissements de minorités fanatiques (ultra-conservateurs américains et islamistes radicaux)

Elle fait passer au second plan des enjeux aussi stratégiques que la course à l’énergie, la question de l’eau ou celle de l’alimentation des populations.

 

Civilisation : ensemble de caractères matériels, moraux, religieux, linguistiques, artistiques et sociaux communs à une société ou à un groupe de sociétés

Aires de civilisation : espaces culturels où on retrouve ces caractères communs.

Sécularisation : désigne la perte d’influence des religions dans les sociétés (Max Weber)

Jihad : guerre sainte

 

II ….2001 à nos jours, le 11 septembre et ses suites

 

a)     …La première puissance mondiale rendue vulnérable  sur son sol par les attentats du 11-09….

 

Le 11  septembre 2001, un groupe de 19 personnes d'origine saoudienne pour la plupart, détourne quatre avions et détruit ainsi les tours jumelles du World Trade Center à New-York et endommage sérieusement le Pentagone à Washington. Le bilan humain est de 2995 victimes. Le monde découvre alors Al Qaida.

Al Qaida (la base en Arabe) : structure informelle créée en 1988, qui regroupe 24 organisations réparties dans 40 pays au moment  des attentats du 11 septembre 2001.

 

b)     s’engage au Moyen-Orient  dans la lutte contre le terrorisme international

En réaction, George Bush applique la stratégie de la Global War on Terrorism (Guerre Globale contre le Terrorisme). Une coalition internationale menée par les États-Unis intervient le 7 octobre 2001, en Afghanistan entraîne en cinq semaines la chute du régime des talibans qui abritait Ben Laden. Le pays reste politiquement instable et la pression islamiste se maintient sous la forme désormais d'une guérilla. Les Etats-Unis, comme la France, restent engagés dans le pays mais le retrait des troupes est pour les uns engagé pour les autres envisagé.

 

En mars 2003, une autre coalition menée par les EU envahit l'Irak. Il s'agit d’une guerre préventive (troisième guerre du golfe). (voir le travail d’Andréa et de Thibault). Les EU estiment à tort que l'Irak possède des armes de destruction massive et soutient le terrorisme international. Des doutes sont exprimés notamment par la France sur la légitimité de cette intervention. C'est sans mandat onusien que l'offensive est lancée. Au début de la guerre on peut parler de conflit dissymétrique. Achevée officiellement en mai 2003, cette guerre se mue en conflit asymétrique opposant des forces très différentes  par leurs natures et leurs puissances.

 

Conflit dissymétrique : les forces opposées sont comparables du point de vue de leur organisation mais pas de leurs forces.

 

c)     … tandis que d’autres conflictualités aux motifs divers s’éternisent ou apparaissent

Parmi les conflits contemporains. On peut distinguer les conflits internationaux (ou conflits inter-étatiques) des conflits internes. Parmi les conflits internationaux les motifs sont variés. Ainsi les tensions qui opposent aujourd’hui encore l’Inde au Pakistan sont liées à des rivalités territoriales (le Cachemire). Ce type de rivalité caractérise également le conflit entre Erythrée et Ethiopie. En réalité, les motifs des conflits sont le plus souvent complexes. Ainsi les interventions d’Israël au Sud-Liban (1982 puis 2006) sont justifiées par un argument sécuritaire. L’Etat hébreux est en effet exposé à des attaques du Hezbollah. Mais le contrôle des provinces situées au nord d’Israël a toujours été stratégique pour son approvisionnement en eau. 

 

Les causes des conflits internes sont également multiples. Il existe des conflits à dimension révolutionnaire comme en Afrique du Nord et au Moyen-Orient à l’occasion du Printemps arabe. En Libye, Muhammad Kadhafi est renversé par des rebelles aidés par la France (voir le travail de Guillaume et de Kevin). En Syrie, Bachar al-Assad n’est toujours pas renversé à l’issue d’un conflit qui dure depuis 2011 et qui a fait plus de 200000 morts (voir le travail de Yanis et Taïwani). D’un point de vue politique, en Ukraine une guerre civile oppose une partie de la population favorable à un rapprochement avec l’Union européenne à une autre plutôt pro-russe (voir le travail d’Amandine et de Laura). Dans ce dernier cas, la guerre est aussi liée au contrôle du trafic de drogue. Dans certains cas, des oppositions identitaires cachent en réalité des convoitises économiques. Au Nigéria partagé entre islam et chrétienté, c’est la question de la redistribution des revenus du pétrole qui crée des crispations. Ce n’est donc pas uniquement et simplement un conflit religieux. En République Démocratique du Congo, les différents seigneurs de guerre attisent les rivalités ethniques pour mieux procéder au pillage d’un sous-sol exceptionnellement riche.  Pour terminer le conflit israélo-palestinien est à la fois un conflit de nationalités (une terre, deux peuples), un conflit économique pour le contrôle de terres agricoles, un conflit religieux dont Jérusalem serait l’enjeu symbolique. 

 

d)     … et que d’autres menaces planent sur le monde

La lutte contre le terrorisme international n’a pas réussi à mettre les sociétés occidentales à l’abri des attentats comme le prouvent les attaques du 11 mars 2004 à Madrid, du 7 juillet 2005, du 7-9 janvier et du 13 novembre à Paris. Désormais, Al Qaida n'est plus la seul nébuleuse ou franchise terroriste. Il faut compter avec DAESH ou Etat islamique.

Par ailleurs,  avec la fin de la guerre froide la menace nucléaire n’a pas disparu. Depuis la fin de la guerre froide, les deux grands cherchent à réduire leur arsenal nucléaire. Par exemple, en avril 2010,  B. OBAMA et V. POUTINE  ont signé un accord START (Strategic  Arms Reduction Talks)  destiné à réduire leur armement de 1550 ogives. De ce point de vue, on observe donc un processus de déprolifération verticale. C'est à dire qu'il y a une réduction du nombre des armes nucléaires. Seulement, le risque de prolifération horizontale demeure. Le nombre d'États soupçonnés de posséder l'arme nucléaire ou des programmes avancés augmente. Aux 5 États qui possèdent officiellement l'arme nucléaire ( E-U, Russie, France, R-U, Chine), s'ajoutent désormais des États qui possèdent l'arme nucléaire sans le déclarer ( Inde , Pakistan, Israël), des États sur lesquelles prétendent la maîtriser (Corée du Nord) et des Etats qui cherchent activement à l’obtenir ( Iran).

Il convient de signaler que se développent également  des formes cyber guerres .

Cyber guerre : guerre de l'information, pour l'information, contre l'information

 

Conclusion :

Qu’ils soient internes ou inter-etatiques, les conflits n’ont pas disparu après la guerre froide. Compte tenu de l’émergence du terrorisme islamiste et de l’affirmation de revendications identitaires, certains ont cherché à expliquer ces affrontements par un choc des civilisations. Si cette théorie est largement contestable, elle a pu séduire les extrémistes de tous bords susceptibles de trouver là le moyen de justifier des agissements dont les motivations sont en réalité  moins avouables.

 

Auteur : Nérée Manuel

 

Bibliographie :

GERE F., Pourquoi les guerres ? Un siècle de géopolitique, 20.21 d’un siècle à l’autre, Larousse, 2002 

FOUCHER M., Les nouveaux (dés)équilibres mondiaux, documentation photographique, la documentation française, n°8072, nov-dec 2009

LACOSTE Yves, Géopolitique, la longue histoire d’aujourd’hui, Larousse, 2008

ROY O., Généalogie de l'islamisme, Hachette, 1995

FILIU J-P, Les 9 vies d’Al-Qaida, Fayard, 2009.

VICTOR J-C, RAISSON V, TETART F. Le Dessous des cartes. Atlas géopolitique. Editions Arte-Tallandier, 2005.

 

Dernière mise à jour : 05-16

 

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