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La guerre
froide à travers Berlin, la crise de Cuba et la guerre du Vietnam
A partir de l'étude du film Dr Folamour, de Stanley
Kubrick-1963-1964
La
guerre froide est une expression inventée
par le journaliste Walter Lippmann en 1947. Elle désigne un conflit d'intensité variable opposant, sans affrontement direct, deux superpuissances de 1947 à 1989. C'est
un conflit idéologique où chacun des
pôles cherche à diffuser son modèle. Il en résulte une bipolarisation du monde en deux blocs, chacune des deux puissances essayant d'étendre sa zone d'influence.
Questions posées :
Quelle
vision Stanley Kubrick donne-t-il du monde dans son œuvre ?
Quels
sont les moyens cinématographiques utilisés pour rendre cette vision du monde ?
Quels
sont les aspects de la guerre froide qui apparaissent dans ce film ? 4
Une
proposition de synthèse : disque paramétré.
Pb : en quoi Berlin, la
crise de Cuba et la guerre du Vietnam sont-ils le reflet d'un conflit d'un
genre particulier : la guerre froide ?
I Le blocus de Berlin, reflet de la bipolarisation du
monde.
a) Les doctrines Truman
et Jdanov inscrivent le monde dans des logiques bipolaires.
En
mars 1947, le président américain Harry Truman fait une déclaration au congrès
où il présente son pays comme le leader du monde
libre et des démocraties libérales.
Il oppose son modèle au régime politique soviétique présenté comme totalitaire. Pour endiguer l'expansion
de l'influence soviétique en Allemagne (endiguement-containment), il propose la
mise en place du plan Marshall. En
septembre 1947, à l’occasion d’une conférence
qui réunit en Pologne les partis communistes européens, Andrei Jdanov,
bras droit de Staline lui répond en
affirmant que le monde est désormais divisé en deux camps où s’affrontent les
puissances impérialistes (les EU et leurs alliés) et les démocraties populaires anti-impérialistes à la tête desquelles se
trouve l'URSS. Pour coordonner l’action des partis communistes, il met en place
le KOMINFORM. Le conflit de la
guerre froide s’engage donc sur une logique d’affrontement idéologique.
Démocratie libérale : démocratie libérale: régime où les libertés fondamentales sont
respectées et où existent plusieurs partis politiques.
Démocraties populaires : régime où il n'existe qu'un parti, le parti
communiste qui représente la classe ouvrière et par extension le peuple.
Plan Marshall
: plan d’aide aux nations européennes adopté en 1947 et
appliqué en 1948. Il prévoit une aide de 13 milliards de dollars sous forme de
prêts (15%) et de dons (85%) destinée à 16 pays.
KOMINFORM :
organisation de liaison des partis communistes
b) Berlin enjeu de cette
bipolarisation.
Dans
un contexte d'occupation quadripartite,
les Etats-Unis proposent de faire bénéficier l'Allemagne de l'aide du plan Marshall. Staline refuse que cela
concerne également la partie contrôlée par les soviétiques. Par ailleurs, les
occidentaux décident de réunir leurs
zones (bi puis trizone) et la création d'une nouvelle monnaie, le deutsche mark. Staline perçoit ces mesures comme des provocations
et des remises en cause de la conférence
de Yalta. Il décide donc le 24 juin 48, le blocus de Berlin ouest. Les
routes et les voies ferrées qui relient la ville à l'Allemagne de l'ouest sont
coupées. Les américains organisent un pont aérien gigantesque : pour
ravitailler les Berlinois (transport de 2,5 millions de tonnes de matériel en
un an, 80% de charbon). Les soviétiques lèvent le blocus en mai 1949. Le 8 mai
1949, est adoptée une nouvelle constitution qui donne naissance à la République fédérale allemande (RFA). Le
7 août 1949, l'URSS, transforme sa zone d'occupation en démocratie
populaire : la République démocratique allemande (RDA). Berlin et l'Allemagne
deviennent donc le reflet de la bipolarisation
de l'Europe et du monde : la Chine devient communiste en 1949.
La constitution d'un
système bipolaire (schéma)
RDA-RFA (schéma)
L'Europe divisée (schéma)
Un monde bipolaire (schéma)
II Cuba 62, l'une des crises d'un conflit à intensité
variable.
a) Origines, déroulement
et issue de la crise des fusées.
En
1959, Fidel Castro et ses compagnons de la Sierra Maestra parviennent à renverser la dictature de Batista. En
1961, la CIA américaine soutient la tentative de débarquement des anti-castristes dans la baie des Cochons. En 1962,
Fidel Castro se tourne donc vers Nikita Khrouchtchev pour lui demander une aide militaire. L’installation de fusées soviétiques
est donc engagée. Un avion espion américain U2 repère cette menace directe pour
les E-U. En réalité, les Etats-Unis sont exposés depuis 1957 à des engins de
longue portée soviétiques. Il s'agit du lanceur de Spoutnik. Kubrick y fait
allusion dans le film Dr Folamour. J.F
Kennedy exige le retrait de cet armement et impose un blocus. Il envisage même
l’engagement des deux puissances dans un conflit nucléaire. Finalement, le 28
octobre 1962, Khrouchtchev fait faire demi-tour aux navires acheminant la
cargaison militaire. Dans le film, le point de non-retour des avions est
l'enjeu qui crée toute la tension du scénario. En contre partie, les américains promettent de ne pas attaquer
Cuba et de retirer leurs fusées Jupiter de Turquie.
A
cette occasion, la probabilité d'un affrontement nucléaire entre les deux
superpuissances fut telle qu'une détente fut
nécessaire. En 1963, un téléphone
rouge est installé entre les deux capitales. On retrouve cet objet dans de
nombreuses séquences du film, comme si le dialogue entre les hommes ne pouvait
plus se faire que par la médiation de la machine . Ce rapport entre l'homme et
sa création est une constante dans la réflexion cinématographique de Kubrick : 2001, l'Odyssée de l'espace, Full Metal
Jacket. En 1972 sont signés les accords SALT 1. En 1975, les américains et les soviétiques collaborent dans
la conquête de l'espace en montant l'opération
Apollo-Soyouz.
Ce
n'est là qu'un épisode des séquences crise-détente qui jalonnent la guerre
froide.
SALT : strategic arms limitation talks, négociations sur la limitation
des armes stratégiques.
b) La température variable
des relations internationales entre les deux grands.
Robert Oppenheimer, :«
Maintenant, je suis Shiva, le destructeur des mondes »
En
1948-1953, le blocus de Berlin (juin
48-mai 1949) et la guerre de Corée
sont des "sommets" (Pierre Grosser) de la guerre froide. Avant la partition de la Corée en 1953, le général
américain envisage même le recours à l'arme nucléaire.
Après
la mort de Staline en 1953, son
successeur N. Khrouchtchev, conscient de l'équilibre
de la terreur et de la destruction mutuelle assurée (MAD), propose en 1956
une coexistence pacifique où
l'affrontement entre les deux puissances doit être remplacé par une compétition
sportive (course aux médailles aux JO), idéologique, scientifique, culturelle
et économique. Remarque, dans le film, l'ambassadeur fait référence au poids "des dépenses imposées par la
course à l'armement". Dans ce
contexte, l'arme nucléaire doit demeurer une arme de dissuasion. L'affaire de l'avion espion américain abattu en
1960, la construction du mur de Berlin en
1961 (du jour au lendemain, 113 km de long pour empêcher le départ de
ressortissant de RDA) et la crise
de Cuba en 1962 mettent fin à cette période de bonnes relations relatives
entre les deux grands. La détente
nécessaire qui résulte de cette dernière crise majeure est un temps
confirmée par Brejnev, successeur de Khrouchtchev, qui envisage même un condominium des deux puissances sur le
reste du monde. Mais à la fin des années 70, les relations se tendent à
nouveau. L'influence communiste est alors à son apogée. Mais le président
républicain Ronald Reagan affirme le retour
en puissance des Etats-Unis ("America is back"-projet IDS ou
guerre des étoiles). Les nouvelles tensions entre les deux grandes puissances
donnent lieu à la crise des euromissiles. On parle alors de guerre fraiche. Conscient de l'épuisement de l'URSS, dans la course à l'armement, le réformateur
Mikhaïl Gorbatchev arrivé au pouvoir en 1985 engage avec Ronald Reagan une politique de réduction de l'armement
nucléaire (traité de Washington en 1987). Finalement, en novembre 1989, chute le mur de Berlin. En décembre de
la même année le sommet de Malte
clôt officiellement la guerre froide.
Crise des euromissiles : au début des années 80, les E-U installent en
Europe des Pershing en réponse aux SS20 soviétiques.
Dissuasion : c'est la capacité à
décourager un adversaire de passer à l'attaque.
III La guerre du Vietnam, enjeux de la guerre des
influences dans le monde.
a)La guerre du Vietnam.
En
1954, après la guerre d’Indochine,
les accords de Genève divisent le Vietnam au niveau du 17ème
parallèle, entre le la république
démocratique du Viêt Nam présidée par le communiste Hô Chi Minh au nord,
et le Viet Nam du sud dirigé
successivement par l’empereur Bao Daï et des dictateurs Diêm puis Thieu. Cette
même année Dwight Eisenhower craint la propagation du communisme en Asie par
contagion. C’est la théorie des dominos.
En 1957, le gouvernement
communiste du nord décide d’unifier le Vietnam en lançant le
soulèvement des divers groupes d’opposition du sud qu’il soutient grâce à
la piste Hô Chi Minh. En 1964, l’administration américaine qui soutien le Viet Nam du Sud, exploite un
incident mettant aux prises deux destroyers américains et la flotte
nord-vietnamienne pour s’engager officiellement dans le conflit. Se met en
place une guerre asymétrique. Aux bombardements intensifs par les B52, à
l’utilisation d’armes chimiques et aux effectifs colossaux de l’armée
américaine (550 000 soldats américains en 1968), le Viêt-Cong répond par des actions de guérilla.
L’année
1968 est un tournant dans le
conflit. L’offensive nord-vietnamienne du Têt (nouvel an chinois) permet de
prendre le contrôle de centaines de villes au sud et l’opinion publique
américaine devient profondément hostile au conflit. En 1969, les
troupes américaines commencent à être rapatriées. Ce la n’empêche pas le
massacre de My lai par les hommes du lieutenant William
Calley. En janvier 73, sont signés les accords de Paris
qui prévoient le retrait définitif des
troupes américaines. En 1975, le Nord envahit le Sud et est
créée la République socialiste du Viêt
Nam. Saigon est renommée Hô Chi Minh Ville en l'honneur du président précédent
du Nord Viêt Nam. Des milliers de Vietnamiens fuient leur pays (Boat People)
Guerre
du Vietnam (schéma)
Crise
de Cuba (schéma)
b) Les blocs et
l'extension variable des zones d'influence.
Même
dans les périodes d'apaisement des relations internationales chacune des deux
superpuissances cherche à étoffer son système
d'alliance et à étendre son
influence. L'OTAN, créée en 1949 est complétée par l'ANZUS en 1951, l'OTASE
en 1954 et le Pacte de Bagdad en 1955. En 1950, Mao et Staline signent un traité « d’amitié, d’alliance et
d’assistance mutuelle sino-soviétique ». En 1955, l’URSS met en place le Pacte de Varsovie qui renforce sont
contrôle sur les démocraties populaires.
A
la fin des années 50 et dans les années 60, cette logique de blocs connaît
cependant des limites. Des Etats
issus pour certains de la décolonisation prônent le non-alignement. Puis, la Chine de Mao prend ses distances vis à vis des soviétiques. Le bloc communiste n'est plus monolithique. De son coté en 1966, De
Gaulle décide le retrait de la France du
commandement intégré de l'OTAN.
A
partir de la deuxième moitié des années 70, l'influence communiste progresse en
Asie mais aussi en Afrique et en Amériquelatine. Au Moyen-Orient, en 1979, les
américains perdent un allié stratégique à l'occasion de la révolution iranienne. Les soviétiques interviennent en Afghanistan. Mais comme les américains au Vietnam,
ils s'enlisent dans ce conflit
périphérique et asymétrique. Ils doivent se retirer en 1989.
OTAN :
organisation du traité de l’Atlantique Nord. Elle compte, à sa création, 16
Etats membres.
Pacte du Pacifique ou
ANZUS : Australie, Nouvelle-Zélande, Etats-Unis.
OTASE
(organisation du traité de l’Asie du Sud Est) : les trois pays de l’ANZUS + le
Pakistan, les Philippines, la Thaïlande, le Royaume-Uni et la France.
Pacte de Bagdad :
Royaume-Uni, Turquie, Iran, Pakistan,
Irak.
Conclusion :
Berlin,
la crise des fusées et le conflit vietnamiens sont donc bien le reflet d’une
guerre idéologique où chacune des deux grandes puissances essaie de diffuser
son modèle et d’étendre son influence à l’ensemble du monde. Il n’y a pas
d’affrontement direct mais comme le dit Pierre Grosser, la Guerre Froide fut
certainement la plus meurtrière du 20ème siècle. Enfin, on le
constate avec les différentes crises, pendant toute la durée de la guerre
froide (1947-1989) alternent des phases de tensions et de détentes.
Auteur :
Nérée Manuel
Bibliographie : P. Grosser, La Guerre Froide, Documentation Photographique, la
documentation Française, Dossier n° 80055, 2007.
Dernière mise à jour : 05-16