Les grandes phases de la première guerre mondiale et leurs enjeux stratégiques

 

A partir du 28 juin 1914, l’Europe se laisse entraîner dans un enchaînement d’événements si rapide qu’il surprit les plus bellicistes des états-majors. A la veille du conflit dans chacun des camps, la guerre est le plus souvent annoncée comme courte et victorieuse. 

 

Quelles furent les phases de ce conflit ? Quels en furent les enjeux stratégiques et tactiques ?

 

Stratégie : ensemble des moyens économiques, politiques et militaires mis en œuvre pour remporter la victoire finale. C’est la technique de conduite générale de la guerre.

 

Tactique : art qui consiste à mener le combat sur le terrain face à l’ennemi au cours de la bataille.

 

Quelles sont les grandes phases de la première guerre mondiale et par quels enjeux stratégiques sont-elles caractérisées ?

 

I les offensives. Août 1914-décembre 1914.

A priori, c’est la Triple Alliance qui est dans la situation stratégique la plus complexe puisqu’elle est prise entre deux fronts.

a) Sur le front ouest.

L’état-major allemand pousse Guillaume II à la guerre pour éliminer au plus tôt la puissance européenne qui leur semble la plus menaçante à l’avenir compte tenu de son rythme de développement : la Russie. Le plan Schlieffen est donc mis en application pour en finir au plus vite avec le front ouest. Il s’agit de contourner les armées françaises en passant par la Belgique, pays neutre. Dans un premier temps, c’est une réussite face au plan XVII de l’état-major français. Les troupes de la Triple Alliance parviennent aux environs de Meaux et de Senlis soit à 50 km de Paris. Cependant, les généraux Von Kluck et Von Bülow commettent une erreur tactique.  Ils décident d’effectuer un mouvement tournant afin de prendre à revers les troupes françaises massées vers la frontière Allemande. Or à Paris la garnison rassemblée par Gallieni peut être mobilisée. Les fameux Taxis de la Marne sont utilisés afin de réaliser une contre offensive.

C’est la Bataille de la Marne en septembre 1914. Le 5 septembre, les français parviennent à réaliser une trouée de 40 km de long qui divise les troupes allemandes. Le 9 septembre est décidé un repli général allemand le long de la ligne de l’Aisne.

Cet épisode est suivi d’une « course à la mer »  dont le réel objectif n’est pas le littoral. Cette progression vers l’ouest s’explique essentiellement par les tentatives de débordement respectives des deux armées.

 

b) Sur le front Est .

Pour soutenir leurs alliés de la Triple Entente, les Russes engagent les hostilités à l'Est. Ils  parviennent à battre les Autrichiens notamment en Galicie. Cependant, le "rouleau compresseur russe" est bloqué par les généraux allemands Hindenburg et Ludendorff à Tannenberg (5 min)  ( 27 août 1914) et aux Lacs Mazures ( 10 septembre 1914). Ils profitent notamment de la supériorité technique de l'armée allemande et de l'éloignement entre les deux armées russes. 

 

c) Sur le front Sud.

Dans un premier temps, les Serbes parviennent à résister aux Autrichiens. Ils repoussent leurs attaques. En décembre 1914 , ils parviennent même à reprendre leur capitale Belgrade.

Conclusion : la première phase de la première guerre mondiale est caractérisée par une guerre de mouvement.

Guerre de mouvement : guerre où la priorité est donnée à l’offensive et aux tentatives de débordement de l’adversaire.

 

 

II L’enlisement et la préparation de la rupture. 1915-1916.

a)       sur le front ouest.

Le front se stabilise sur 800 km, de la mer du nord à la Suisse. C’est le début de la guerre de position. Dans cette configuration, les moyens utilisés sont les suivants : les tranchées, l’artillerie, les gaz asphyxiants ( première utilisation à Ypres en 1915 ) et les premiers chars d’assaut ( septembre 1916- chars britanniques appelés tank à cause du camouflage utilisé pour les transporter). De temps en temps de vastes offensives sont lancées. C’est une guerre extrêmement coûteuse en hommes. La bataille de Verdun (21 min) en est un cruel exemple. Le 21 février 1916, à 16h45 après  9 heures de bombardement (1 millions d’obus)  est lancée l’offensive Allemande. Les historiens discutent au sujet des objectifs réels de cette bataille. Le Kronprinz et Falkenhayn  ont, un temps, affirmé qu’il s’agissait simplement de « saigner à blanc » l’armée française. En réalité, il semble que Verdun ait été le réel objectif d’une offensive que l’on voulait décisive car le temps jouait pour l’Entente. Le 25 février le fort de Douaumont est abandonné. Le 6 mars, les Allemands passent sur la rive gauche de la Meuse. Le 14 Mars, ils atteignent le « Le mort homme ». Le 27 mai, ils atteignent la cote 304. Le 7 juin, ils arrivent au fort de Vaux. Dans le fort, la résistance du commandant Raynal est héroïque. L e 24 octobre, le fort de Douaumont est donc repris. Le 2 novembre, c’est au tour de Vaux.  En août, la cote 304 et « le mort homme » sont repris.  Finalement, les Allemands sont repoussés au niveau de leur point de départ. Le bilan est cependant extrêmement lourd est la saignée a affaibli les deux camps. Les Français comptent 221000 morts et 32000 blessés. Les Allemands, eux dénombrent 240000 morts et 260000 blessés. Au total, sur le front Ouest, la guerre a fait 1,7 millions de victimes.

Le  recul allemand s'explique par l'attaque lancée par les Russes sur le front est et par le lancement d'une nouvelle offensive audacieuse plus à l'ouest dans la Somme. La bataille de la Somme lancée le 1er juillet 1916 mais décidée dès décembre 1915 à Chantilly, (36min36) est un échec face aux Allemands qui ont réussi a organisé leur défense. Dès le premier jour les Britanniques perdent 20 000 hommes. Au total, la bataille qui s'achève en novembre 1916 fait plus d'un millions de victimes (morts, blessés, disparus) dans les deux camps.

 

Guerre de position : c’est une guerre où l’objectif est d’empêcher l’adversaire de progresser. C’est une guerre défensive, d’usure destinée à affaiblir l’adversaire pour tenter une offensive localisée afin de rompre le front.

Tranchées : séries de couloirs étroits creusés, précédés par des barbelés et parfois des mines.

Boyaux : ils permettent la liaison entre les différentes tranchées.

 

b)       Sur le front Est.

Se constitue un front de la Baltique aux Carpates. On assiste là également à une guerre de position.

 

c)       Au Sud, de nouveaux fronts et de nouveaux alliés.

Conscients des faiblesses de la Russie après ses défaites face à l'Allemagne, les Français et les Britanniques décident d'ouvrir le détroit des Dardanelles (40 min)  contrôlé par l'empire Ottoman pour ravitailler leur allié russe (1m22). Les troupes de l'Entente sont pour beaucoup constituées de soldats du Commonwealth britannique ( Australiens, Néo-Zélandais)  et de l'empire colonial français (tirailleurs Sénégalais). Après l'échec des attaques navales, un débarquement de troupes est décidé à Gallipoli le 25 avril 1915. C'est un échec face au général Allemand Otto Liman Von Sanders et au colonel Turc Moustafa Kemal. En janvier 1916, les alliés évacuent leurs derniers hommes dans la région. L'offensive des Dardanelles est un échec. 180 000 soldats alliés y ont perdu la vie, de même que 66 000 turcs. En mai 1915, l’Italie entre dans le conflit aux côtés de l’Entente. Ainsi se forme un nouveau front contre l’Autriche-Hongrie.

Cependant, en octobre 1915, la Bulgarie entre en guerre aux côtés de la Triple Alliance. Avec l’Autriche-Hongrie, elle finit par l’emporter rapidement sur la Serbie. La Roumanie, rentrée en guerre en août 1916 aux côtés de l’Entente est rapidement vaincue. 

On constate donc que sur le front Sud, la guerre de mouvement se poursuit et le conflit s’étend.

 

III Vers la reprise des offensives. 1917- 1918.

a)       1917- vers un nouveau rapport de force ?

En mai 1915, un paquebot américain le Lusitania transportant des passagers mais aussi des munitions pour l’Entente est coulé par un sous-marin ( U-Boote) Allemand considérant que si le navire était neutre sa cargaison ne l’était pas. Cet acte qui fait de nombreuses victimes notamment des américains, suscite une vive réprobation des Etats-Unis mais n’entraîne pas leur entrée en guerre. Cependant, en février 1917, afin de mener une véritable guerre économique destinée à réduire l’approvisionnement de la Grande-Bretagne, les Allemands s’engagent dans une guerre sous-marine à outrance. Le 2 avril 1917 : les Etats-Unis décident donc de s’engager dans la guerre.  Ils sont d’ailleurs suivis par de nombreux pays latino-américains. On assiste donc à une mondialisation du conflit. Sur le papier, la Triple Entente semble renforcée, mais il faut compter avec la lenteur naturelle d’une telle mobilisation et avec une défection majeure.

En octobre 1917, les bolcheviks prennent le pouvoir en Russie. Ils avaient assis leur popularité sur le slogan Le Pain , La Paix, La Terre.  Le 3 mars 1918, la Russie signe donc avec l’Allemagne, la paix de Brest-Litovsk. La Russie se retire donc du conflit.

 

b)       La reprise du conflit.

La Triplice a tout intérêt à profiter de sa supériorité provisoire. Les allemands lancent donc une série d’offensives sur le front Ouest :en mars en Picardie ( offensive Michael), en avril dans les Flandres, en mai en Champagne (offensive Blucher).Dans un premier temps, les troupes Allemandes progressent. Elles parviennent à bombarder Paris avec d'énormes pièces d'artillerie que les français ont appelé à tord Grosse Bertha. Il s'agissait en réalité plusieurs canons de gros calibre ( Pariser Kanonen). Mais ces offensives se soldent finalement par un échec.  Les Allemands perdent 700 000 hommes de mars à juin. Les alliés perdent eux 568 000 hommes sur la même période.

Car les alliés unifient leur commandement sous la direction de Foch, en outre plus d’un million d’Américains commandés par le général Pershing arrivent en Europe. En septembre 1918, est lancée une contre-offensive alliée. Elle entraîne le repli Allemand. Ce sont cependant, les défections sur le front Sud et la situation intérieure qui poussent  les Allemands à capituler. 

 

c)       Sur le front Sud.

On assiste à une série de victoires des troupes de l’Entente sur le front Sud. Le 29 octobre 1918, les Italiens remportent la victoire de Vittorio Veneto. Depuis Salonique, les forces franco-britanniques conquièrent la Bulgarie et libèrent la Serbie et la Roumanie. La Bulgarie finit par signer l’armistice le 29 septembre 1918. L’empire ottoman le fait le 31 octobre. L’Autriche-Hongrie signe, elle le 3 novembre.

 

Le 11 novembre, l’armistice avec l’Allemagne est signé à Rethondes, dans le Wagon de Foch immobilisé dans la Forêt de Compiègne .

 

Conclusion : Il est possible de distinguer trois grandes phases successives dans la première guerre mondiale. Une première marquée par une guerre de mouvement où chacun pense par ses offensives pouvoir l’emporter rapidement. Une seconde plus défensive traduit le changement de nature des conflits à la fin du XIXème siècle et au début du Xxème siècle. La guerre est désormais industrielle et technologique. Elle n’en est pas moins barbare. La dernière phase, résulte d’une rupture dans l’équilibre des forces et se traduit par une reprise des offensives jusqu’à la victoire finale de l’Entente.