Mutations agricoles et recomposition des espaces ruraux en Inde

Quels sont les enjeux de l'agriculture indienne ?  Quelles sont les transformations qui en résultent ? Comment se traduisent ses mutations dans l'organisation de l'espace agricole indien ?

La leçon sous la forme d'un schéma

En Inde se pose très tôt la question de la satisfaction des besoins alimentaires de la population. Quand la politique de la révolution verte est lancée dans les années 60, l'Inde compte déjà plus de 400 millions d'habitants et la population connaissait régulièrement des crises alimentaires. Pour satisfaire les besoins de cette population,  le gouvernement engage alors une politique volontariste destinée à développer l'irrigation, l'usage des engrais, des pesticides, des machines, des variétés à haut rendements (VHR) pour augmenter la production agricole. De ce point de vue là, cette politique est globalement une réussite puisque dans les années qui suivirent la  production agricole a triplé par rapport à celle  des  années 50. Pour beaucoup, c'est la plaine du Gange et les régions du Penjab et du Bihar, traditionnellement très densément peuplées, qui ont bénéficié de cette intensification de la production. Une partie de la production est désormais destinée à l'exportation. Ces régions attirent des populations rurales venues des zones défavorisées du centre de l'Inde. Car le pays connaît, des migrations internes importantes, notamment un exode rural qui contribue à l'extension des villes mais se traduit par la permanence de zones d'habitat précaire dans les grandes métropoles, les slums. Dans la périphérie des villes, se développe une petite industrie rurale (fabrication de pièces, de matériel de construction, textile). Ailleurs, notamment dans l'ouest de l'Inde, l'agriculture reste diversifiée.

La révolution verte connaît cependant des limites. Le recours aux produits chimiques a eu des conséquences graves pour les populations et pour l'environnement. Pour faire l'acquisition des semences et des intrants,  les petits exploitants s'endettent vis à vis des fournisseurs et se retrouvent parfois dans des situations intenables. Leur santé est souvent altérée par l'usage de produits chimiques. Les sols et les eaux sont pollués. Certaines zones deviennent stériles Pour les petits agriculteurs la situation s'aggrave ave le désengagement de l'Etat dans les années 90-2000.

Depuis des efforts ont été faits. En 2013, l'inde adopte la loi food security act qui assure la distribution alimentaire pour 820 millions de personnes. En ce qui concerne l'environnement, la politique des parcs naturels se poursuit, entre autres dans les zones forestières ou les territoires montagneux aux abords de l'Himalaya. Là, on cherche à développer l'écotourisme et le tourisme rural.  Le Kerala dans le sud-ouest de l'Inde, bénéficie lui aussi de cette diversification des activités. Il a été visité par 12.5 millions d'indiens en 2015. Concernant l'agricultures de nouvelles pratiques sont promues. C'est ainsi que le Sikkim dans le nord de l'Inde est devenu le premier Etat 100% bio du monde.  Dans des régions comme le Kerala, on cherche aussi à développer l'agroforesterie qui permet de concilier cultures au sol et cultures arborées.  Plusieurs associations proposent le retour aux semences paysannes pour libérer les agriculteurs de l'emprise des fournisseurs d'intrants et maintenir la biodiversité.

La carte des campagnes indiennes est le reflet de la diversité et des dynamiques des espaces agricoles en Inde.

Cependant, les difficultés du monde agricole demeurent. En moyenne, le revenu agricole moyen des agriculteurs  indiens est de 6400 roupies, soit  80 euros par mois. Il faut dire que 70% des agriculteurs indiens possèdent moins de 2 acres de terre.  Ceci explique l'existence de mouvements favorables à une réforme agraire comme les naxalites. Régulièrement, les paysans continuent à protester contre l'accaparement des terres par de grands groupes ou pour l'effacement de leur dette.  La sécurité alimentaire reste un enjeu. L'Inde doit  encore nourrir 17 % de la population mondiale avec 4% des ressources en eaux mondiale et 4% des terres agricoles. Les aléas climatiques n'arrangent pas les choses. Cette année encore la grave sècheresse suivie d'une forte mousson ont  provoqué une pénurie d'oignons, produit très consommé dans le pays.

Conclusion : Pour répondre aux besoins alimentaires de la population la révolution verte a intensifié la production agricole. Si des progrès ont été ainsi réalisés, les nouvelles pratiques agricoles ont généré d'autres problèmes et n'ont pas bénéficié à toutes les régions et à tous les agriculteurs. Comme ailleurs dans le monde, on observe donc une grande diversité des espaces et des situations agricoles.

 

Réforme agraire : redistribution des terres agricoles.

Mousson : saison des pluies en Asie.

Naxallite : mouvement révolutionnaire réclamant une redistribution des terres au bénéfice des pus humbles.