Enquête
: L'espace productif de l' automobile française : une géographie en mouvement
Le secteur automobile français illustrerait-il la
tendance à la désindustrialisation du pays ?
La répartition des activités
automobiles françaises est à l'image des mutations
de l'industrie du pays. Le secteur reste important pour l'économie
française. Il représente encore 16 à 17% du chiffre d'affaire de l'industrie
manufacturière française. En 2016, environ 2.200.000 personnes occupaient un
emploi dans le secteur, soit 8 % de la population active.
Pendant longtemps la production est restée concentrées dans les grands pôles urbains et dans le Nord-Est de la
France. Dès les années 60, la politique volontariste d'aménagement du territoire a cherché à développer les usines dans
le grand ouest. C'est ainsi par
exemple que Citroën s'est installé à Rennes en Bretagne. Il s'agissait déjà de
chercher une main d' œuvre bon marché, des ouvrières notamment.
Cependant, depuis la crise
des années 70 et celle de 2008, l'industrie automobile française est en perte de vitesse. Alors qu'en en 2004,
la France battait son record de production automobile avec 3,66 millions de
véhicules sortis des usines nationales, le chiffre est tombé à 2,27 millions de véhicules en 2019.
Désormais, la production automobile française est la cinquième de l’Union européenne et
la dixième dans le
monde. Alors qu'elle produisait 6 % des
véhicules dans le monde en 2000, elle ne réalise plus que 2% des voitures aujourd'hui
(CCFA -2019)
Concrètement, cela se traduit
depuis quelques années par des diminutions
d'activités voire des fermetures
d'usines. On peut citer pour les plus symboliques, l'usine de Boulogne-Billancourt de Renault en
1992, ou celle de PSA à Aulnay sous bois
en 2013. Le site Renault de Flins n’emploie plus
que 2640 personnes, contre encore 7000 dans les années 2000. En 2019, Peugeot a
annoncé la fermeture du site historique d'Hérimoncourt dans le Doubs. Daimler a
annoncé que la production de Smart d'Hambach serait
délocalisée en Chine en 2022. Ford a décidé de fermer son usine de boîtes de
vitesses de Blanquefort près de Bordeaux. C'est l'une des formes prises par la désindustrialisation en France.
Il faut dire que la production nationale est concurrencée sur
le marché français et international. Sur le marché national, les
constructeurs français représentent encore 57% des ventes contre 43% pour les
constructeurs étrangers. Il convient
cependant de relativiser ce chiffre.
En effet, pour une bonne part les voitures de marques
françaises sont produites à l'étranger. PSA ne produit plus qu'environ 30%
de ses véhicules en France et Renault environ 20%. Ces entreprises ont délocalisé une partie de leurs
activités vers l'Europe de l'Est et du Sud, vers le Maghreb et l'Asie. Cela
s'explique certes par la recherche de
nouveaux marchés mais aussi surtout par la recherche d'une main d'œuvre bon marché.
L'internationalisation de l'activité passe aussi par des alliances avec des constructeurs étrangers. On peut citer l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi ou
encore PSA qui produit désormais les modèles Opel.
Il ne faudrait cependant pas
conclure hâtivement que la France est perdue pour l'automobile. On trouve encore sur le territoire d'importantes unités de production comme
Sochaux ou Flins. Par ailleurs, la France reste
un pays attractif pour certains
investisseurs de l'automobile. Toyota a renouvelé ses investissements à
Onnaing près de Valencienne, si bien que la Yaris est
la voiture la produite en France. Le choix de ce site en 1998 où la production
fut lancée en 2001, s'explique par son passé industriel, la présence d'une
main d'œuvre qualifiée, par la bonne
desserte par les voies de communication et par sa localisation au cœur de la Dorsale européenne qui
constitue un marché privilégié pour la petite citadine. Bosch continue à
produire des injecteurs diesels à Onet près de Rodez.
Mais cette activité est
menacée par les solutions de transports
de demain avec la volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre
et de particules. Ceci explique l'importance de la recherche pour créer le véhicule de demain qui ne sera pas
forcément terrestre et avec chauffeur. Quatre pôles de compétitivités consacrés à l'automobile complètent les centres de recherche comme le Technocentre de Renault dans les Yvelines ou les différentes unités de recherche de
Sofia-Antipolis.
Conclusion :
l'activité automobile française est intégrée
dans un système productif de
dimension internationale. La délocalisation de certaines activités
contribue à la fermeture d'unités de
production donnant le sentiment qu'un processus de désindustrialisation est amorcé. Mais ce processus est loin d'être
achevé et n'est peut-être pas inéluctable. La
France reste un espace de production. Les constructeurs français et
étrangers trouvent encore dans la sphère périproductive
française des avantages qui expliquent la localisation d'activités, de la
recherche-développement à la commercialisation en passant par le financement.
Il peut être intéressant de visiter ce site pour
l'illustrer.
https://group.renault.com/groupe/implantations/
Auteur : Nérée Manuel