Titre : Mumbai : une
métropole du sud fragmentée dans le contexte de la mondialisation.
Les
villes du nord n'ont pas le monopole de la métropolisation. Celle du sud
connaissent aussi la tendance à la concentration des hommes et des activités
liée à une intégration croissante dans les flux de la mondialisation. A Mumbai (ex-Bombay), comme ailleurs, la question se pose essentiellement en termes
de développement et d'intégration dans la mondialisation. La ville
est-elle bien intégrée dans les flux de la mondialisation ? Est-elle connectée
aux réseaux de communication dans le monde ? Quelle est sa contribution au
poids économique croissant de l'Inde ? Cette métropole concentre-t-elle des
fonctions de commandement ?Le développement
doit, lui, assurer l'amélioration du niveau de vie au bénéfice du plus grand
nombre. Dans le cas de Mumbai, mégapole de 23 millions d'habitants, on constate qu'en dépit de
l'expansion de la ville, nombreux sont ceux qui demeurent exclus, marginalisés,
ne vivant que des miettes de la
croissance. Il convient donc de s'interroger sur les disparités socio-spatiales et sur les dynamiques susceptibles de modifier l'organisation de la
ville.
Problématique : En résumé, il s'agit de se demander comment
évolue la métropole. Comment s’insère-t-elle dans la mondialisation ? Est-elle
une ville globale ? Comment s'est elle développée ? L'a-t-elle fait de
façon maitrisée ? Reste-elle marquée par de profondes disparités
socio-spatiales ?
Dynamiques :
évolution d’un territoire, qu’elle soit positive ou négative.
Développement :
amélioration du niveau de vie du plus au bénéfice du plus grand nombre.
Disparité socio-spatiales : inégalités sociales traduites dans l’espace.
Mondialisation :
mise en relation des différentes parties du monde par la multiplication de flux
de natures diverses.
I Mumbai, d'une
mondialisation à l'autre...
a)
D'un site
initial, exploité durant la période coloniale...
La
ville de Mumbai s’est développée d’abord sur un site littoral de presqu’île. Les
Portugais puis les Anglais à partir de 1661, ont exploité la présence de ces
iles, désormais reliées entre elles pour en faire un port. Donc dès la période coloniale, Mumbai
exploite une situation de carrefour
entre l’Inde et la métropole d’une part et entre les provinces du nord et celle
du sud d’autre part. Elle s’inscrit dès lors dans des flux, déjà intenses pour
l’époque, de personnes et de marchandises.
b)
... la ville s'est étendue vers le nord et
l'est....
Pour
permettre ces échanges, les Britanniques développent des infrastructures de transport. Ainsi depuis les îles et le port du
Sud, une voie ferroviaire se divise et se prolonge vers le nord selon deux axes. La ville s’étend alors dans deux directions vers le nord et l’est
de part et d’autre du parc Sanjay Gandhi. C’est dans ces zones là
qu’apparaissent les premiers ateliers de tissage et de filature. Désormais, l’étalement urbain se poursuit vers le
nord, l’est et le sud. Le parc national et l’espace amphibie de la mangrove sont également grignotés par
ce processus d’urbanisation.
Etalement urbain : extension de la ville vers sa périphérie
Urbanisation : - extension des espaces urbains.
- augmentation de la population urbaine dans la
population totale.
c)
...devenant un
centre économique et décisionnel majeur en Inde
En
un siècle, Mumbai qui comptait moins d’un million
d’habitants est devenu aujourd’hui une mégapole
de plus de 23 millions d’habitants. C’est un centre économique majeur. La chimie, la pharmacie, le diamant
comptent parmi ses spécialités. Elle bénéfice de la délocalisation des activités de sous-traitance dans le contexte de la mondialisation. Cela concerne les applications informatiques
(quartier d’Andheri), l’analyse de marchés, les
centres d'appel multilingue, la finance, la comptabilité, les services
juridiques. C’est aussi un centre
financier de premier plan. La bourse de Mumbai
est la première établie en Asie en 1875. Aujourd’hui, c’est la première place
boursière du pays. Ces activités sont concentrées dans le quartier de Nariman. C’est également à Mumbai
qu’est tourné un tiers des films indiens.
Ceci explique l’expression Bollywood construite
pour désigner à l’exportation un certain cinéma indien et favoriser son rayonnement international. C’est
aujourd’hui encore un nœud de
communication. Mumbai est desservie par le
premier port et le premier aéroport du pays. Mumbai
participe donc clairement à la mondialisation.
Mégapole : ville de plus de 8 millions d’habitants (ONU)
Délocalisation : transferts d’activités dont les productions sont
destinées, en principe, à satisfaire les besoins des pays d’origine des
investissements.
II …. se développe de façon duale.
a) …Des centres d’affaires et des quartiers résidentiels
jouxtent
Dans
le paysage, on peut distinguer par le
caractère vertical de leurs aménagements, plusieurs quartiers d’affaires. On peut citer les quartiers d’Andheri, de Bandra Kurla ou de Navi Mumbai. Ce
dernier correspond à la création d’une ville
nouvelle à l’est de la Thane Creek. La ville de Mumbai
est donc désormais polycentrique.
Ces quartiers ont des fonctions
décisionnelles majeures à
l’échelle de l’Union indienne. On y trouve par exemple le siège social de la transnationale indienne Tata. Mumbai est désormais au 15ème rang mondial pour le prix du m2 dans ses CBD. Cependant, ce n’est pas la capitale de l’Union indienne.
A
proximité de ces CBD, on trouve des zones
plus résidentielles, notamment à l’ouest. Certaines sont occupées par les
classes moyennes émergentes en Inde, les autres par les catégories plus
aisées. On y trouve des centres
commerciaux à l‘occidentale, comparables
aux malls américains et des résidences de grand
standing comme la maison la plus chère du monde. Il s’agit de l’Antilia House 27 étages, 37000 m², pour une seule famille.
CBD :
central business district, centre d’affaire.
Malls :
centres de consommation associant activités commerciales et récréatives.
b)
… des quartiers
extrêmement pauvres
Le long
des axes ferroviaires mais
aussi sur le littoral et dans le parc national se sont développés des quartiers d’habitat précaire :
les slums. Là, la population dans une extrême
pauvreté n’a accès ni à l’eau, ni à l’électricité. Seul un foyer sur six a accès à l'eau courante. A Dharavi, le plus grand bidonville d’Inde vit 1million
d’habitants sur 175 hectares. On y
dénombre un WC pour 1500 habitants. Cela donne une idée de la faiblesse du
niveau d’équipement. Au total, 60% des habitants de Mumbai
vivent dans ces bidonvilles ou dans les rues.
Slum : terme anglais désignant l'habitat précaire.
c)
… Il existe
cependant des interactions entre ces
territoires.
Dans
certains de ces quartiers s’est développée une importante économie informelle. Elle occupe les 2/3 des actifs de Mumbai, en relation souvent avec des activités économiques
déclarées. Certaines tâches sont en effet parfois sous traitées dans de petits
ateliers. Par ailleurs, certains slums occupent des terrains qui excitent l’appétit des
spéculateurs fonciers compte tenu de leur situation.
Economie informelle : ensemble des activités qui échappent à la comptabilité
nationale.
d)
… les limites
du développement de Mumbai
L’aménagement
urbain de Mumbai présente cependant encore des limites. Dans le domaine des transports, la ville a certes le
privilège de posséder un réseau urbain
relativement dense. Ainsi les trains
et les bus publics totalisent 88% des 11 à 12 millions de déplacements journaliers. A lui seul le réseau ferroviaire est emprunté
par 6 millions de passagers par jour. Mais
ces réseaux sont désormais insuffisants
et connaissent des phénomènes de saturation.
Des investissements sont donc prévus pour étendre le réseau de transport
collectif. Des lignes de métro sont réalisées ou en cours de réalisation. La persistance des bidonvilles même
consolidés (basti) prouve par ailleurs que les logements restent très insuffisants.
Conclusion :
Mumbai est
donc une mégapole. C’est également
un centre productif et décisionnel. Par ailleurs, ces infrastructures lui
permettent d’être un carrefour, un nœud
de communication. Est-ce pour
autant une ville globale inscrite dans la « modernité »
mondialisée ? Non pas tout à fait. Ce n’est pas la capitale politique de
l’Union indienne. Les disparités socio-spatiales extrêmement marquées restent
le reflet d’un mal développement profond. Par ailleurs, les équipements
présentent encore des insuffisances.
Mumbai est
donc une ville mondiale de second rang.
Mais son dynamisme en fait une ville en
transition, à l’image d’une puissance
émergente à la recherche d’un
développement partagé.