L’information imprimée : de la diffusion de l’imprimerie à la presse à grand tirage.

 (L’exemple de la France)

Pour le Larousse, la liberté de la presse est "le droit donné à chacun de faire connaître par écrit, ou tout autre moyen de communication, ses opinions, droit de faire paraître un journal, sans autorisation préalable". C'est aujourd'hui dans notre République une précieuse évidence, mais il n'en a pas toujours été ainsi.

 

Quelles sont les conditions technologiques et légales qui ont permis la création et la diffusion de la presse française ? Quel est la situation de la presse imprimée aujourd’hui en France ?

 

 

I La liberté de la presse est une longue conquête car ...

 

a) ... dès ses origines

 

L'amélioration  de l'imprimerie par Gutenberg au milieu du XVe siècle, permet de reproduire les écrits en plusieurs exemplaires mais il faut attendre 1605 pour que Jean Carolus imprime  à Strasbourg le premier périodique imprimé au monde "Relation". Les premiers périodiques, sont surtout des mensuels. En France, le premier grand périodique est La Gazette de Théophraste Renaudot.

 

 

b) ....la presse est contrôlée.

 

Ce dernier obtient, en effet, dès 1631 un privilège royal à perpétuité  lui garantissant le monopole de l'information sur les « choses passées et avenues, ou qui se passeront tant dedans qu'au dehors du royaume ». en 1780, La Gazette compte 12 000 abonnés. En dépit de ce monopole, d'autres journaux voient cependant le jour. En 1788, on comptait à Paris une trentaine de publications diverses, dont deux quotidiens, et en province une vingtaine de journaux d'annonces qui fournissaient aussi quelques nouvelles locales. Cependant, cette presse reste soumise à une sévère censure. Au XVIIIe siècle cette institution s'appelle la Librairie.

 

 

c) La liberté de la presse est très provisoirement proclamée à la Révolution.

 

Le premier journal d'opposition, le Journal des états généraux, naît avant même le début de la Révolution.  Mais il est  interdit le surlendemain de sa publication par la monarchie. Les premières années de la Révolution ouvrent une période de grande liberté pour la presse. Plus d'un millier de journaux voient le jour entre 1789 et 1794. L'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen stipule que « tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement ». Cependant sous Robespierre et la Terreur, elle est à nouveau étroitement encadrée.

 

II La presse écrite se développe cependant au XIXe siècle...

 

a) ...d'abord sous contrainte...

Bonaparte soumet la presse à une autorisation préalable. Sous la Restauration, un « délit de tendance » est institué. Il restreint la liberté d'expression.  L'édition de journaux est réservée à une élite qui en a les moyens. Les journaux sont soumis à une obligation de cautionnement ou à des taxes spécifiques: "droit de timbre". Les investissements sont perdus si le journal est interdit.

Louis-Napoléon censure également la presse à partir de 1852. Un décret interdit aux journaux de rendre compte des débats parlementaires et des procès Les journaux ne respectant pas ce décret pourront être suspendus après un avertissement et définitivement supprimés s'ils récidivent. Entre mars 1852 et juin 1853, 91 avertissements seront délivrés par le ministre de la Police, Maupas.

 

b) ...puis sans entrave....

 

Après la chute du second Empire en 1870, les lois constitutionnelles de 1875, définissent la IIIe République. Celle-ci adopte  la loi du 29 juillet 1881 qui stipule dans son article 1 que « l'imprimerie et la librairie sont libres ». « Tout journal ou écrit périodique peut être publié sans autorisation préalable et sans dépôt de cautionnement"  Cette loi fonde depuis la liberté de la presse en France. La République espère fonder la démocratie sur une opinion publique éclairée dans tout le pays. Les progrès techniques, comme la rotative, l’offset ou l’héliogravure, permettent d’augmenter les tirages, d’en améliorer la qualité et d’en réduire le coût. Dans ces conditions, en 1880, le tirage de quotidiens dépasse, en France, les 3 millions d’exemplaires par jour. En 1914, le Petit Journal sort à 1.4 exemplaires/jour.  En dehors de quatre à cinq grands titres généralistes, les 244 titres de 1914 sont essentiellement des journaux d’opinion ou des périodiques spécialisés.

 

c) .....mais encadrée pour éviter les excès.

Pour commencer, elle sanctionne l’injure et la diffamation, notamment à l'encontre des représentants de l'autorité publique.

Emile Zola exploite donc tous les aspects de  cette loi en publiant en 1898 , dans le journal, L'Aurore sa lettre ouverte intitulée par Clemenceau : J'accuse. Il utilise habilement, la liberté de la presse pour mettre en accusation, tous ceux qui, notamment au ministère de la guerre, ont cherché à accabler Dreyfus. En faisant, cela il s'expose volontairement à des poursuites et à un procès pour diffamation afin de créer une nouvelle occasion judiciaire de défendre Dreyfus qui, en principe, ne peut plus être jugé.

 

 

III La loi de 1881 reste appliquée aujourd'hui dans un nouveau contexte.

 

a) Elle a été aménagée...

 

Ainsi la loi Gayssot de 1990  interdit la publication de messages incitant au racisme et à la xénophobie . D’autres  lois protègent les  mineurs et  la dignité humaine en empêchant la diffusion de messages à caractère violent ou pornographique. Dans les lycées, c'est la loi de 1881 qui s'applique lorsqu'on publie un journal lycéen.

 

 

b ) ...mais d'autres menaces pèsent sur la liberté de la presse  

 

Aujourd'hui dans un contexte de crise de la presse écrite où la diffusion des quotidiens et des magazines a diminué globalement de 8% en 10 ans. Aujourd’hui en France (dernières données 2021), c’est le journal Le Monde qui est le plus diffusé avec plus de 445 000 exemplaires publiés et payés quotidiennement. On assiste désormais  à la concentration des médias entre les mains de grands groupes d'industrie dirigés par des capitaines d'industrie comme Marcel Dassault,  Xavier Niel, Mathieu Pigasse ou Bernard Arnault. C'est le pluralisme de la presse qui semble aujourd'hui menacé. En février 2022, une commission parlementaire à consulté les grands patrons de presse pour évoqué ce sujet. Aujourd'hui c'est la presse gratuite et la presse en ligne qui se développent. La question est de savoir si la législation sur la presse est adaptée à ces nouveaux médias.

Pour terminer, c'est la liberté de la presse qui est également visée par les attentats du 7 janvier contre Charlie Hebdo. Ceux qui ont revendiqué cet attentat ont estimé que le journal satirique avait blasphémé or ce délit n'existe pas dans le droit français. Les caricaturistes ont seulement fait usage de leur liberté d'expression.

 

 

Censure : fait de condamner un texte ou une opinion, d'en interdire sa diffusion. Désigne également l'institution qui en a la responsabilité.

Diffamation : fait de porter atteinte de façon mensongère à la réputation d'une personne, d'une institution ou de ses représentants

 

Conclusion : L'histoire de la liberté de la presse est donc l'histoire d'une longue conquête. Les étapes fondamentales de son établissement sont la Révolution française et la IIIe République.  La loi de 1881 est d'ailleurs l'un des ses héritages majeurs. Elle s'applique aujourd'hui encore avec quelques aménagements.  Désormais en France, la censure est moins étatique qu’économique. La liberté d'expression est cependant attaquée lorsque des terroristes s'en prennent à des organes de presse.