L'Europe de 1945 à nos jours : des enjeux en évolution ?

 

Au sortir de la seconde guerre mondiale l’Europe est détruite et affaiblie. Les puissances coloniales européennes sont remises en cause alors que l’URSS et les Etats-Unis, les deux grands vainqueurs de la seconde guerre mondiale s’affirment sur la scène internationale.

L’Europe doit être reconstruite de préférence dans la paix alors que se manifeste de façon de plus en plus évidente un nouveau conflit dont le vieux continent devient l’un des théâtres. Les enjeux européens  sont donc multiples : comment préserver la paix ? Quelle attitude adopter face à l’influence des deux grands ? La chance de l’Europe réside-t-elle dans un transfert de souveraineté à une instance fédérale ? L’Europe en construction incarne-t-elle un modèle alternatif ? Comment maintenir ou créer une puissance européenne ? Où s’arrête l’Europe ? Ces questions se posent alors que le contexte change entre 1945 et 2010. En 1947, la guerre froide est clairement enclenchée. En 1951 débute la construction de ce qui deviendra l’Union européenne. En 1989, les démocraties populaires se libèrent les unes après les autres du joug soviétique. En 1991, on assiste finalement à la dislocation de l’URSS.

 

Pb : Entre 1945 et 2010, se pose-t-on toujours les mêmes questions au sujet de l’Europe ? Les réponses sont-elles toujours les mêmes compte tenu de l’évolution du contexte ?

 

I 1945-1969 : L’Europe soumise à influences

a)     Face à l’influence des deux grands

En Europe de l’est, la mise en place d’un régime communiste se fait selon trois processus différents :

-Dans certains cas, les partisans communistes qui ont résisté à la domination nazie prennent le pouvoir dès la libération : Yougoslavie, Albanie.

-Dans d’autres cas plus nombreux la prise de pouvoir est plus progressive et suit un mode opératoire assez semblable :

1 Libération par l’armée soviétique.

2 Participation des communistes à des gouvernements de « front national ». Ils sont minoritaires.

Front national : gouvernement d’union nationale issu de la résistance, regroupant des communistes, des socialistes, des partis paysans, des libéraux et des nationalistes.

3 Noyautage de l’administration et conquête des ministères clefs (Défense, intérieur, justice)

4 Organisation d’élections truquées : Pologne (janvier 47), Roumanie (novembre 46), Bulgarie (novembre 45). 

5 Elimination des adversaires et  des autres structures. Calomnies, accusation d’espionnage.

On a donc la mise en application de la tactique du salami (expression  inventée par le communiste hongrois Rakosi)

Tactique du salami : expression décrivant l’élimination progressive des pouvoirs extérieurs aux communistes (Eglise et autres partis) « tranche après tranche , jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien »

A ce moment là, les sociétés civiles sont réduites au silence dans les démocraties populaires.

Société civile : toutes les structures non-étatiques qui de la famille jusqu’aux associations et aux églises rassemblent les individus autour d’opinions et d’activités communes. C’est l’ensemble des structures sociales indépendantes de l’Etat.

-Dans le cas de la Tchécoslovaquie, il y a résistance des autres forces politiques. Les communistes réalisent donc le coup de Prague en  février 48 pour s’emparer du pouvoir et obliger le président Benès à la démission.

Coup de Prague : Les communistes utilisent la pression de la rue pour pousser à la démission les ministres modérés. (Manifestation à l’appel du PC et du Conseil central du Parti communiste).

Dans les démocraties populaires de l’Europe de l’est on peut parler de soviétisation car s’impose le modèle soviétique caractérisé par

une dictature politique, un dirigisme économique avec des nationalisations dans les secteurs de l’industrie, des banques et du commerce, une planification de l’activité.

L’Europe de l’est est nettement sous l’influence de l’URSS. On peut parler de satellisation. Le Kominform (1947- 1956) est l’organe de liaison, sous le contrôle de Moscou, des partis et des pays communistes. Le COMECON (CAEM-conseil d’assistance économique mutuelle) (1949)  assure la coopération économique au sein du bloc de l’est. En réalité, se met en place une division socialiste du travail au profit des intérêts de l’URSS. Le pacte de Varsovie (1955) est un système d’alliance militaire réunissant les démocraties populaires d’Europe centrale et orientale autour de l’URSS.

 

L’Europe de l’ouest s’inscrit dans la sphère d’influence américaine. Dans le cadre de leur politique d’endiguement (containment) de l’influence soviétique, les  Etats-Unis mettent en place le plan Marshall. Il s’agit d’aider financièrement la reconstruction des pays d’Europe afin qu’ils ne tombent pas dans la sphère d’influence soviétique. Annoncé en 1947 et appliqué en 1948, le plan Marshall prévoit une aide de 13 milliards de dollars sous forme de dons ( 85 % ) et de prêts (15%) destinée à 16 pays, dont la Turquie perçue comme européenne dans le cadre de l’European Recovery Program. Pour appliquer ce plan est créée l'OECE. Inquiétés par le « coup de Prague », les États-Unis, le Canada et dix pays d'Europe de l'Ouest signent en avril 49, le traité de Washington et créent ainsi l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN, en anglais NATO) pour contrer une éventuelle agression soviétique.

OECE : Organisation européenne de coopération économique, devenue en 1960, organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

 

Conclusion : l’Europe est donc à nouveau divisée mais par un conflit d’un genre nouveau. Elle est désormais soumise à deux influences majeures.

 

b) Le rejet des guerres

Au début des années 50, les fondateurs de l’Europe, des hommes comme le belge Paul Henri Spaak, les français Robert Schuman et Jean Monnet souhaitent préserver la paix. Ils proposent pour cela de mettre en commun les productions de charbon et d’acier de l’Allemagne de la France et éventuellement d’autres pays. La CECA ( Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier) est créée en 1951.

Ils envisagent également de créer une fédération. Ce mot recouvre au moins deux conceptions :

Un système fédéral : c’est sur un territoire défini, la superposition de deux niveaux de pouvoir .

Les Etats réunis possèdent une assez grande autonomie ( justice, éducation). L’Etat fédéral détient lui des pouvoirs importants délégués par les Etats fédérés (défense, diplomatie, monnaie).

Une confédération : ensemble permanent d’Etats ayant des objectifs communs mais dont les états membres restent souverains et autonomes.
Souveraineté : Caractère d’un Etat qui n’est soumis à aucun autre Etat.

Conclusion : pour garantir la paix les fondateurs de l’Europe proposent dans un premier temps une coopération économique et à plus long terme un projet politique.

 

c) Une différenciation marquée des pays du bloc de l’Est.

Par exemple, en Yougoslavie Tito met en place un autre modèle dès 1948. On parle de titisme. Le titisme désigne en Yougoslavie l’attitude du gouvernement de Tito qui se caractérise à l’extérieur par une certaine indépendance vis à vis de l’URSS, une promotion du non-alignement et à l’intérieur par une voie originale du socialisme qui privilégie l’autogestion des usines par les ouvriers.

Après la mort de Staline en 1953 , Tito rencontre son successeur Khrouchtchev qui déclare alors que « plusieurs voies sont possibles vers le socialisme ». 

 

Dans les années 50 et 60 apparaît une contestation de la tutelle soviétique menée par des dirigeants réformateurs des démocraties populaires appuyés par une société civile en développement .                            

RDA : en 1953, des émeutes éclatent en Allemagne à l’annonce d’un relèvement des normes de production. Il s’agit d’un mouvement ouvrier et étudiant.

Pologne : En 56, Gomulka un ancien dirigeant écarté du pouvoir durant la période stalinienne est rappelé au pouvoir sous la pression de la rue. Il commence la décollectivisation des terres et renoue des relations avec les soviétiques.

Hongrie : En 56, en Hongrie, c’est dans les mêmes conditions qu’Imre Nagy arrive au pouvoir en 56 dans une contexte d’insurrection généralisée. Il proclame le retour au pluripartisme et dénonce le pacte de Varsovie.

Tchécoslovaquie. En janvier 68, Alexandre Dubcek qui semble incarner un « socialisme à visage humain » devient secrétaire général du PC tchécoslovaque. Il est soutenu par un mouvement populaire. Il mène une politique de réforme tout en affirmant sa loyauté à l’égard des soviétiques. Le retour au pluralisme, aux libertés de la presse, et de réunion sont envisagés. C’est le « Printemps de Prague ».

 

Mais dans tous les cas on assiste bien vite à une normalisation.

Les autorités soviétiques (Khrouchtchev puis Brejnev) font très vite comprendre que l’émancipation des démocraties populaires a des limites.

En 1953 en RDA, Ulbricht appelle les soviétiques pour réprimer le mouvement et se maintenir au pouvoir. L a répression fait des centaines de morts.

En 1956, Les chars russes écrasent l’insurrection de Budapest le 4 novembre 1956. Des milliers de morts et de blessés, 15000 déportés, 100000 à 200000 exilés.

En 1968, le 20 août, les troupes du pacte de Varsovie occupent la Tchécoslovaquie. Dubcek est arrêté. Le parti est épuré.

La situation est donc normalisée dans les démocraties populaires.

Normalisation : expression utilisée pour désigner le retour « aux formes normales de la démocratie socialiste », c’est à dire la mise au pas du pays.

Dans les années 60, Brejnev développe également la notion de souveraineté limitée.

Souveraineté limitée : principe Brejnévien selon lequel la souveraineté de chaque Etat passe après les intérêt de la communauté socialiste ( bloc de l’Est).

 

d)Les limites du processus d’intégration en Europe de l’ouest.

L’intégration économique se poursuit à l’ouest.  Le traité d’Union lancé à Messine en 1955 se concrétise en 1957  par la mise en place du Marché commun.  ( Communauté Economique Européenne) à l’occasion du traité de Rome. La CEE ne rassemble alors que six pays.  Dans ce contexte, la PAC ( Politique Agricole Commune) est mise en place en 1961 .

Si la CEE compte une assemblée parlementaire constituée de députés parlements nationaux. L’intégration politique n’en resta pas moins limitée. Par exemple, le projet de CED ( Communauté Européenne de défense) échoue en 1954 face à l’opposition en France de Communistes et de Gaullistes.

Les craintes sont les suivantes :

La peur d’un réarmement de l’Allemagne.

La perte d’une souveraineté française.

La mise en place d’une défense Atlantiste dominée dans le cadre de l’OTAN par les Etats-Unis. 

 

En retirant la France du commandement intégré de l’OTAN , De Gaulle a aussi manifeste la souveraineté de la France.

En outre, il qui voit dans le Royaume-Uni un allié systématique des Etats-Unis oppose son veto à l’admission du ce pays dans la CEE. Les britanniques fondent donc une zone de libre échange : l’AELE en 1959. A l’ouest aussi, il existe donc des Europes.

Conclusion : De 1945 à 1969, l’Europe est divisée. L’Europe de l’est est satellisée par l’URSS qui impose non sans difficultés son modèle. L’Europe de l’ouest s’inscrit dans la sphère d’influence américaine. A l’ouest, justement une intégration économique sert le projet politique de maintenir la paix. La construction politique reste alors limitée. L’attachement aux souverainetés nationales reste grand.

 

II Le rapprochement des europes ( 1969-1989)

a) Le rapprochement entre les deux allemagnes, un aspect de la détente

Jusqu’en 67,les relations entre la RFA et la RDA sont très mauvaises. Les deux Etats ne se reconnaissent pas mutuellement. Mais à partir de 1969,  Willy Brandt chancelier de RFA de 1969 à 1973 prône  l’Ostpolitik qui aboutit à la reconnaissance mutuelle des deux Allemagnes en 1970.

En 1972, les deux Allemagnes signent un traité par lequel ellse reconnaissent leurs frontières respectives. Elles se garantissent également une non ingérence dans leurs affaires intérieures.

Les deux Allemagne sont admises à l’ONU en 1973.

 

b) En Europe de l’Ouest la construction d’un autre modèle.

Dans ce contexte l’Europe, s’affirme comme un nouveau modèle entre les deux autres. Le modèle Européen est un modèle libéral mais où l’Etat à un rôle redistributif important dans le cadre de l’Etat providence.

On observe cependant des variantes : le modèle est plus libéral au Royaume Uni en particulier sous Margaret Thatcher. Le modèle allemand est fédéral et fonctionne sur le principe d’une économie sociale de marché ( économie libérale- protection sociale garantie- dialogue social ouvert avec de puissants syndicats) , le modèle français est plus centralisé. L’Etat intervient alors beaucoup dans le domaine économique.

Durant cette période de 1972 à 1986, l’Europe connaît une nouvelle impulsion et poursuit son élargissement. En 1972,l’ élargissement est ratifié. Le Royaume Uni, le Danemark et l’Irlande entre dans la CEE. En 1981, ils seront rejoints par la Grèce puis par l’Espagne et le Portugal en 1986. Dans le domaine économique, en 1978 est crée le système Monétaire Européen (SME) avec une unité de compte commune qui préfigure l’euro : l’écu.  Politiquement également, l’intégration se poursuit puisqu’en 1979, le Parlement européen est élu au suffrage universel.

L’acte unique ratifié en 1986 crée le conseil Européen. Un vrai pouvoir politique est installé au sein de l’Europe. Cet approfondissement  renforce le caractère original de cette organisation qui n’est plus seulement une zone de libre échange et un marché unique. Elle devient également une organisation politique.

 

c) Un bloc de l’est de plus en plus poreux mais toujours menaçant.

Le rideau de fer semble en effet de plus en plus perméable et fragilisé :

Le contexte  a en effet changé :

En 1972 s’ouvre en effet, à Helsinki, la conférence sur la sécurité et la coopération en Europe  à laquelle participe l’URSS.

Dans l’acte final de la conférence signé en Août 1975, 32 pays européens, les E-U, le Canada et l’URSS s’engagent à respecter les principes comme la souveraineté des Etats et les droits de l’Homme. 

De plus, le système économique des pays d’Europe de l’est montre ses limites. Il y a pénurie, inflation ( 60% /an en Yougoslavie) et dans certains cas apparition du chômage.

Enfin, au sujet de la Pologne, en 1978 , le polonais Karol Wojtyla devient pape (Jean-Paul II). Il soutient l’opposition au régime communiste. Il fait un voyage en Pologne en 79.

Dans ce contexte, la contestation se développe dans la société civile. En 1977, 257 citoyens tchécoslovaques signent une Charte qui, sur les bases de l’acte final de la conférence d’Helsinki, réclame le respect des libertés fondamentales. C’est la Charte 77. Le leader de ce mouvement est l’auteur dramatique Vaclav Havel.

En Pologne, en 1980, les ouvriers de Gdansk se mettent en grève et créent le premier syndicat indépendant Solidarnosc (leader Lech Walesa). Le mouvement est brisé en 1981 par le général Jaruzelski qui décrète « l’état de guerre ». 10000 personnes sont arrêtées. 

Cependant, l’URSS reste menaçante et l’Europe est toujours un enjeu de la guerre froide. En particulier lorsqu’on assiste à un refroidissement. La crise des Euromissiles en témoigne. L’URSS déploie des SS20 en Europe de l’est. L’OTAN réplique en installant des fusées Pershing. En dépit des manifestations pacifistes, la course à l’armement est relancée.

Elle finit par épuiser l’URSS. A son arrivée au pouvoir Michael Gorbatchev considère qu’il est nécessaire de signer un traité de non prolifération Washington 1987. Il engage des réformes ( Perestroïka-Glasnost ) et annonce aux dirigeants des démocraties populaires qu’ils ne pourront plus compter sur l‘intervention de l’Armée rouge en cas de crise grave. Il déclare également aux dirigeants hongrois qu’une sortie du pacte de Varsovie est envisageable.

Conclusion : Même si cette partie du monde  reste pendant cette période un enjeu de la guerre froide, un rapprochement est perceptible entre les différentes europes. A l’ouest, le processus d’intégration se poursuit par des élargissements et un début d’approfondissement. Emerge alors un autre modèle. Les occidentaux peuvent le présenter aux sociétés civiles du bloc de l’est qui semble de moins en moins monolithique.

 

III Les enjeux de la construction européenne depuis 89. Vers une intégration complète.

a)1989-1991 : l’implosion de la zone d’influence socialiste, la fin d’une division européenne.

En 1989, suite à de nouvelles grèves le gouvernement polonais, reconnaît le syndicat Solidarnosc et permet des élections pluralistes. La victoire de Solidarnosc entraîne la nomination d’un premier ministre non communiste, Mazowiecki.

En Hongrie, le Parti Communiste abandonne son rôle dirigeant. L’opposition gagne les premières élections pluralistes en juillet. Le 2 mai 1989 le e « rideau de fer » est ouvert.

En RDA, de nombreux allemands de l’est profitent de l’ouverture du rideau de fer en Hongrie pour émigrer en RFA. D’importantes manifestations ont lieu à Dresde et à Leipzig. Finalement, Honecker accepte l’ouverture des frontières en novembre 89, c’est la chute du mur de Berlin. ( 9 novembre 1989).

En Tchécoslovaquie, la «  Révolution de velours » entraîne la démission des dirigeants communistes et l’élection à la présidence de la République de Vaclav Havel, le 29 décembre 1989.

En Roumanie, Ceausescu, refuse de céder le pouvoir. Il est lâché par l’armée et Moscou. Son départ se fait sous la pression populaire. Il est fusillé le 25 décembre après un jugement sommaire.

Cl : L'implosion de la zone d'influence soviétique ouvre la voie à l'élargissement de l'Union européenne à l'est.

b) 1989-2003 : la poursuite de la construction européenne.

En Europe de l’ouest, la construction économique se poursuit.

En 1992 est adopté le traité de Maastricht. Dans le domaine économique, les conséquences sont les suivantes :

En 1993, le marché commun issu du traité de Rome devient  un marché unique sans frontières intérieures avant 1993.

Marché commun : non donné à l’Union douanière de la CEE.

Union douanière : zone de libre échange tarif extérieur commun

Marché unique : Union douanière avec libre circulation des hommes et des capitaux

En 1999 est créée une monnaie unique, l’Euro. La  Banque centrale européenne (BCE) est établie.  Elle est indépendante des gouvernements, elle  définit la politique monétaire et veille à la stabilité des prix. En 2002, les euros entrent en circulation dans 12 pays ( 15 depuis janvier 2008).

La libre circulation des personnes se met progressivement en place.

Les accords de Schengen signés en 1985, rentrent en vigueur en 1995. Ils permettent une libre circulation entre 8 puis 13 des 15 pays membres à l’époque et un renforcement des contrôles aux frontières extérieures. (Depuis décembre 2007, l'espace Schengen concerne 24 Etats membres

La politique agricole commune est réorientée pour devenir moins productiviste et plus conforme au principe de développement durable.

Conclusion : La construction d’une Europe économique garde donc une certaine avance sur la construction politique.

Poursuite de l’intégration politique.

Le traité de  Maastricht renforce l’intégration politique. L’Union européenne est créée et ses compétences sont élargies, mais le traité de Maastricht n’a pas abouti pour autant à la formation d’une fédération.

Certes les Etats se soumettent aux décisions communautaires dans certains domaines ( commerce, monnaie, agriculture, la  pêche, le  transport). Dans d’autres s’applique également le principes de subsidiarité. Mais des domaines importants échappent encore à la supranationalité. C’est le cas, par exemple, de la politique étrangère même si il est depuis longtemps prévu de mettre en place une PESC ( politique étrangère et de sécurité commune), et de la défense même si des embryons de corps d’armée européens existent. Ainsi, en 1999, l’UE se révèle dans l’incapacité d’intervenir militairement au Kosovo. L’OTAN intervient.

Principe de subsidiarité : l’Union européenne n’intervient que si l’action isolée d’un état membre se révèle insuffisante pour atteindre les objectifs.

L’intégration politique connaît donc encore des limites.  La répartition des pouvoirs dans les institutions européennes donne le sentiment qu’elles souffrent encore d’un déficit démocratique même si les traités d’Amsterdam (1997) et de Nice (2000) renforcent  le rôle du parlement.

 

c) 1990-2017 : enjeux de l’élargissement européen et débats  

L'implosion de la zone d'influence soviétique ouvre la voie à l'élargissement de l'Union européenne à l'est. Dès 1990, en réalisant son unification, l’Allemagne rattache des länder qui constituaient la RDA à l’Ue. En 1993, à Copenhague sont définis les critères d’adhésion à l’Ue : appartenance géographique, respect et garantie des libertés fondamentales et du droit des peuples, acceptation de tous les textes communautaires. En 1995, trois pays « neutres » dans le contexte de la guerre froide intègrent l’Union européenne (Finlande, Autriche, Suède). En 2004, 10 pays  la rejoignent: Estonie, Lituanie, Lettonie, Pologne, République Tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Chypre, Malte. La plupart d’entre eux appartenaient au bloc de l’est.  En 2007, c’est au tour de la Roumanie et de la Bulgarie. Le dernier Etat à intégrer l'Union européenne est la Croatie en 2013.

Les avantages espérés de ce processus sont  alors nombreux. On attend une extension en Europe de l'aire de prospérité et de paix créée par l'Union Européenne, un développement du marché européen qui passe ainsi de 375 millions de consommateurs à plus 500  millions. On espère également une augmentation du poids de l’UE sur la scène internationale.

Mais l’élargissement de l’UE suscite également quelques craintes liées au coût exagéré de l' aide au développement de pays dont le niveau de vie en moyenne est de 23 % inférieur à la moyenne communautaire à l’époque, à la nouvelle répartition des aides de l’Union européenne au bénéfice des nouveaux états membres, à la délocalisation des activités industrielles à valeur ajoutée faible ou moyenne vers ces pays, au développement de phénomènes migratoires internes (question des Roms).  Désormais, la question se pose d’une éventuelle déstabilisation de l’Europe. La Croatie dernière venue sort d’un conflit avec la Serbie. La  Macédoine est candidate. Or ses relations avec la Grèce ne sont pas apaisées. La Turquie adversaire géopolitique de longue date de la Grèce, souhaiterait intégrer l’Union européenne. Elle a cependant une frontière commune avec l’Irak et la Syrie. Elle est actuellement déstabilisée par une grave crise politique interne. Plus récemment la question d’un élargissement intégrant l’Ukraine a été posée. Or une telle situation pourrait créer des tensions avec la Russie de Poutine jalouse de son « Proche étranger ».

L’implosion de la zone d’influence soviétique, fait apparaître un autre enjeu géopolitique majeur. En effet, certains anciens pays du Pacte de Varsovie adhèrent à l’OTAN, complétant ainsi la liste des pays de l’Union  européenne également membres de l’OTAN [22 sur 28(UE)- 28 (OTAN)].  L’influence des Etats-Unis en Europe est donc croissante et la Russie s’estime menacée dans son proche étranger. Par ailleurs, la question de l’intervention en Irak en 2003 a montré que les pays de l’Union européenne ne parlaient pas tous forcément d’une seule et même voix dans le sillage des EU.

Aujourd'hui, l'Union européenne doit gérer trois enjeux majeurs :  la sécurité dans le contexte des attentats, l'accueil des réfugiés dans le contexte des conflits du Moyen-Orient et enfin le risque de dislocation à la suite du Brexit. On assiste, en effet, au développement de l'euroscepticisme dans plusieurs pays membres de l'Ue.

 

Conclusion :

Finalement en 2017, même si les processus d’intégration, d’approfondissement et d’élargissement sont très avancés, se posent encore un certain nombre de questions  présentes dès le début de la période étudiée. Par exemple, Robert Schuman et Jean Monnet parlaient souvent d’Etats-Unis d’Europe. On constate aujourd’hui que  le sujet divise encore les tenants d’une Europe fédérale et les partisans du maintien des souverainetés nationales. La guerre froide est terminée pourtant l’extension d’une Europe atlantiste vers l’est suscite quelques interrogations en particulier lorsque l’Europe est divisée face à la politique étrangère américaine.  Dans le contexte de la guerre froide, le modèle Européen pouvait sembler alternatif en conciliant économie de marché et politique sociale. Ce modèle doit-il s’effacer maintenant que le bloc soviétique s’est effondré ? Un certain nombre d’enjeux traversent donc l’histoire de l’Europe de 1945 à nos jours. Si certaines questions restent en suspens, un acquis demeure : la paix.

 

Dernière mise à jour 12/17