Acteurs et  territoires, pour une approche diatopique (B. Giblin) de la question.

 

a)       Il s’agit d’une région…

dont les définitions ne sont pas admises par toutes les chancelleries. Ainsi les Britanniques  considèrent que le Moyen-Orient s’étend de la rive est de la méditerranée jusqu’à l’Irak et au Koweit. Pour les français, il englobe la péninsule arabique. Les américains  intègrent dans leur vision du Moyen-Orient, l’Afghanistan, le Pakistan et le Maghreb.

b)      …faite de territoires inégalement pourvus en ressources…

L’eau n’est pas rare, mais elle n’est pas abondante et elle est très inégalement répartie. Les gisements peuvent devenir des enjeux majeurs dans les relations compliquées qu’entretiennent les Etats de la région. C’est le cas par exemple du Golan, territoire syrien annexé par Israël. Il s’agit d’un véritable « château d’eau » pour la région. Pour continuer, la région abrite 64% des gisements prouvés de pétrole. L’Arabie saoudite détient 20% des réserves prouvées, l’Irak 12%, l’Iran 9%. Concernant Israël, des réserves ont été découvertes en Méditerranée. Le gisement Mary-B est en exploitation, le gisement Léviathan reste en réserve. Cette ressource peut motiver des conflits comme entre l’Irak et le Koweït en 1990. Le transit des ressources et des marchandises est également extrêmement important. Ceci explique le caractère stratégique du canal de Suez, du détroit d’Ormuz et de conduites comme le trans-arabian pipeline (tapline).

Ressources : éléments du milieu exploités par une société pour satisfaire ses besoins.

c)       …et marquée par un peuplement d’une grande diversité culturelle.

Le  Moyen-Orient comme d’autres régions du monde est loin d’être homogène d’un point de vue culturel. Au niveau linguistique par exemple, l’hébreu et l’arabe ont de commun d’être des langues chamito-sémitiques. Mais il faut compter aussi avec le persan en Iran et le Kurde. Le turc, lui est une langue ouralo-altaïque. Il existe une multitude d’autres langues minoritaires dans la région. Par exemple, l‘araméen y est encore parlé dans les régions du « levant ». D’un point de vue religieux, cette région du monde est le berceau des trois grands monothéismes : le judaïsme, le christianisme et l’Islam. Ces religions sont elles-mêmes divisées. C’est le cas de l’Islam. Il y a notamment des sunnites, des chiites et des druzes pour ne pas citer toutes les traditions. Le christianisme n’est pas plus homogène. Ainsi, plusieurs églises se partagent les lieux saints du christianisme à Jérusalem. Il est à rappeler que les réalités linguistiques ne recoupent pas systématiquement les réalités religieuses loin de là. Ainsi qui est arabophone n’est pas forcément musulman. C’est le cas des arabes chrétiens du Proche-Orient présents en Israël, au Liban et en Syrie.

d)      Cette complexité est perceptible à plusieurs échelles.

Jérusalem offre un exemple de la proximité de plusieurs communautés. Il y a dans la vielle ville un quartier arménien, un quartier arabe musulman, un quartier arabe chrétien et un quartier juif. On trouve d’autres exemples de cette proximité à grande échelle dans d’autres métropoles de la région comme Beyrouth au Liban, Bagdad en Irak ou Alep en Syrie. A plus petite échelle, la plupart des Etats présentent une certaine diversité de leurs composantes. Le Liban compte de nombreuses minorités que la constitution tente de satisfaire à travers son organisation institutionnelle. En Syrie une minorité alaouite dirige un pays peuplé de chiites, de sunnites, de chrétiens, de circassiens, de druzes, de kurdes et de juifs. Même si l’Etat d’Israël se présente comme un « Etat juif », il n’est pas plus homogène. En effet, certains citoyens israéliens sont arabes (20% de la population). Les uns sont musulmans, les autres chrétiens. Il y a également des druzes. De plus, le peuplement israélien est aujourd’hui complété par des immigrations récentes. Cette question démographique est une des préoccupations des autorités israéliennes. Pour terminer, cette présentation du rapport entre état et communauté. Il convient de rappeler que les palestiniens n’ont pas d’Etat. Certes, la représentation à l’UNESCO est reconnue depuis peu mais l’autorité palestinienne n’a qu’une souveraineté très limitée. 

Schéma :

 

e)       Il faut par ailleurs tenir compte des jeux d’influences dans la région.

A l’échelle régionale, Israël peut sembler isolé au milieu d’Etats qui, pour certains, lui sont carrément hostiles. Ce sentiment d’isolement est d’ailleurs renforcé par les récents accords de Genève concernant le nucléaire iranien. F.  Encel parle a ce titre de complexe de Massada. L’antagonisme avec la Syrie ou avec l’Iran est avéré. Au Liban, chacune de ces trois puissances régionales cherche à appuyer la minorité susceptible de servir son jeu. Ainsi, la Syrie et l’Iran soutiennent le hezbollah chiite. Les monarchies pétrolières du golfe soutiennent, les sunnites libanais et les autorités du Yémen  tandis qu’Israël est l’allié des chrétiens maronites.  Au-delà de cette première sphère, F. Encel démontre qu'Israël cherche à se concilier des Etats dans la région pour constituer une deuxième voire une troisième ceinture et former ainsi des alliances de revers. Enfin dans le jeu diplomatique de la région, il faut tenir compte du rôle des grandes puissances. Depuis 1948, Israël est clairement soutenu par les Etats-Unis. La Russie reste un allié fidèle de Bachar-al-Assad comme en témoigne l’impossibilité actuelle à trouver un règlement international au conflit syrien. 

Conclusion : on ne saurait donc réduire les causes des conflits dans cette région du monde à un seul enjeu.