La dissuasion
nucléaire dans les relations internationales de 1945 à nos jours.
La dissuasion est la capacité à décourager
un adversaire de passer à l'attaque, en le persuadant que la riposte militaire
qu'il encourra annulera les avantages escomptés. La dissuasion a toujours
existé dans le domaine militaire mais elle prend une nouvelle dimension au
milieu du 20ème siècle. En 1938 est découverte la fission
nucléaire. En juillet 45, aux Etats-Unis
a lieu le premier essai de la bombe atomique. Les savants et techniciens à
l’origine de cette nouvelle arme sont conscients de la portée de leur invention :
Robert Oppenheimer, :« Maintenant, je suis Shiva, le destructeur
des mondes »
Pb : Quel est le rôle joué par la dissuasion
nucléaire dans les relations internationales de 1945 à nos
jours ?
I 1945-1949 : un monopole américain, de la
coercition à la dissuasion.
a) La dissuasion discutée avant même la première
utilisation de l’arme atomique.
Joseph Rotblat, réfléchit sur la notion dès le début de la Seconde
Guerre mondiale.
Projet
Manhattan.
16 juillet
1945 : Première explosion d'une bombe nucléaire. Expérience
"Trinity", dans le désert du Nouveau-Mexique.
b)
Hiroshima-Nagasaki : l’utilisation comme moyen de coercition.
6 août
1945 : Bombe atomique sur Hiroshima.100 000 victimes immédiates.
9 août
1945 : Bombe atomique sur Nagasaki. 70 000 victimes immédiates.
L’arme atomique
est alors utilisée par le président américain Harry Truman pour, officiellement, mettre fin à la Seconde Guerre mondiale en
contraignant le Japon à la capitulation ( 2 septembre 45) . c’est donc une arme
de coercition.
c) Un moyen de
démonstration.
Pour certains
historiens, l’utilisation de la bombe atomique au Japon est aussi motivée par
la volonté d’impressionner l’URSS et de se dispenser de partager des profits de
la victoire sur les puissances de l’Axe. Rappel : à Yalta Staline s’était
engagé à déclarer la guerre au Japon après la capitulation Allemande.
Cl : Avec
cette première utilisation, la force dissuasive de l’arme nucléaire est
désormais à l’œuvre.
II 1949-1967 : L’établissement de
« l’équilibre de la terreur » : la dissuasion nucléaire n’est
plus un monopole mais un oligopole.
a) Dans le
contexte de la guerre froide, la mise en place de l’« équilibre de la
terreur ».
L’URSS se dote
de l’arme nucléaire.
29 août
1949 : L’URSS fait exploser sa première Bombe A dans le Kazakhstan.
La course à
l’armement.
Les deux
puissances augmentent le nombre de leurs « têtes nucléaires ».
Elles en
augmentent aussi la puissance :
Le 1er novembre
1952, les États-Unis font exploser la première bombe H, cent fois plus puissante
qu'une bombe A.
Le premier
essai soviétique de la bombe H a lieu le 12 août 1953.
Désormais un
pays entier de petite taille peut être rayé de la carte par l’utilisation d’une
seule bombe.
Conscient de
cette capacité destructrice Khrouchtchev propose la coexistence pacifique.
Remarque :
les bombe A fonctionnent par fission nucléaire, les bombes h ou bombes
thermonucléaires fonctionnent par fusion.
b) La
constitution du « club nucléaire », une prolifération verticale.
3 octobre 1952,
le Royaume-Uni réalise sa première explosion de bombe A.
1957 : le
Royaume Uni expérimente une bombe H.
13 février
1960 : La Première bombe atomique ( Bombe A) française explose dans le
désert du Tanezrouf en Algérie.
1964 : La
Chine fait exploser sa première bombe A.
1967 : la
Chine fait exploser sa première bombe H.
24 août
1968 : La première bombe H française explose à 600 mètres au-dessus de
l'atoll de Fangataufa, dans le Pacifique. Sa puissance équivaut à 170 fois
celle d'Hiroshima. La France devient alors la 5ème puissance nucléaire.
c) Malgré la
théorie de la dissuasion nucléaire, une crise fait craindre « l’emploi»
1962 : la
crise des fusées à Cuba. Les deux puissances sont au bord de
l’affrontement. En 1963 est établi le
téléphone rouge.
Conclusion :
L’équilibre de la terreur est donc établi. En principe, aucun belligérant dans
le contexte de la guerre froide n’a intérêt à utiliser la bombe compte tenu de
la certitude d’être détruit à son tour. La crise de Cuba démontre cependant
qu’on n’est pas à l’abri de l’emploi de l’arme nucléaire. L’avantage dissuasif
de cette arme intéresse d’autres puissances. Les autres membres du conseil de
sécurité se dotent donc de l’arme nucléaire. Jusqu’en 67, le « club
nucléaire » est plutôt fermé mais il est déjà nécessaire de contrôler la
prolifération de puissances nucléaires.
III 1967-2007 : Entre réglementation et
prolifération nucléaire.
a)
vers la dé-prolifération verticale
entre les deux grands.
Du
contrôle :
1972 et
1979 : Les accords Strategic Arms
Limitation Talks (SALT), signés par les États-Unis et
l'Union soviétique fixent aux armes stratégiques offensives des plafonds.
Ceci n’empêche
pas cependant la crise des Euromissiles ( début des années 80) où l’Europe se
transforme en théâtre de l’affrontement entre les deux grands dans le contexte
de la guerre froide.
A la
réduction :
1991 et
1993 : les accords Strategic Arms
Reduction Treaty (START),
imposent une réduction des arsenaux de
chacun des deux pays.
Traité de
Washington (8 décembre 1987) : prévoit la destruction de tous les missiles
soviétiques et américains de portée intermédiaire stationnés en Europe.
Traité de Paris
(19 novembre 1990) sur la parité des arsenaux classiques en Europe entre
Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et Pacte de Varsovie.
Traité de
Moscou (31 juillet 1991) : prévoit la réduction mutuelle des armements
nucléaires stratégiques.
b)
Tentative de contrôle de la prolifération horizontale.
A la fin des
années 60, les puissances du Conseil de Sécurité sont conscientes du risque de
prolifération horizontale.
Elles
établissent donc en 1968 un traité de
non-prolifération nucléaire (TNP).
Par ce traité,
les 5 puissances nucléaires s’engagent à ne pas transférer les armes nucléaires
, ni à aider des Etats non nucléaires à en fabriquer. De leurs cotés es Etats
signataires peuvent accéder au nucléaire civil s’ils se soumettent aux
vérifications de l’AIEA ( Agence Internationale à l’Energie Atomique) et s’ils s’engagent à ne pas se doter de
l’arme nucléaire.
Un succès
relatif :
Des pays non
signataires se sont dotés de l’arme nucléaire :
1967 (?)
1979 ( ?) : depuis ces dates Israël posséderait l’arme nucléaire.
1974 :
l’Inde fait exploser sa première bombe nucléaire.
1998 :
L’Inde réalise 5 tirs nucléaires expérimentaux.
Cinq semaine
plus tard, le gouvernement pakistanais annonce que ses ingénieurs ont réalisé
pour la première fois une série de cinq essais nucléaires dans l'est du pays.
D’une certaine
façon, un équilibre de la terreur se met
en place à l’échelle régionale dans cette partie du monde.
9 octobre
2006 : la Corée du Nord a procédé à un essai nucléaire.
Des pays
signataires auraient ou ont engagé des programmes nucléaires :
L’Iran. (en
cours)
L ‘Algérie (
soupçonné de vouloir développer un programme)
L’Arabie
Saoudite ( Idem)
La Syrie (
Idem)
L’Afrique du
Sud ( abandonné)
La Libye (
Abandonné)
L’Irak (
Abandonné)
Cl : la
bilan de la politique de non prolifération est donc mitigé. Le TNP n’a pas
empêché certains Etats de se doter de l’arme nucléaire. Cependant, sur 192 pays
seulement 9 sont désormais dotés de l’arme nucléaire.
c)
Nouveaux enjeux. La dissuasion est-elle toujours d’actualité dans les relations
internationales ?
Elle est
toujours d’actualité puisque les puissances nucléaires conservent des arsenaux
d’armes atomiques :
Russie : 16 000
têtes nucléaires dont 5 830 actives.
États-Unis : 9
962, dont 5 735 actives.
Chine :
environs 200, dont environs 145 actives.
France :
environ 350 têtes, dont toutes ou presque seraient actives.
Royaume-Uni :
plus de 200, dont un peu moins de 200 actives.
Inde : 40 à 50
têtes, presque toutes actives.
Pakistan : 50 à
60, presque toutes actives.
Israël :
200 têtes selon certaines sources.
d) Apparaissent
également de nouveaux enjeux liés à la menace nucléaire :
Désormais la Corée du Nord possède la puissance nucléaire
et les moyens balistiques nécessaires pour l'utiliser.
La maîtrise du
nucléaire militaire par l’Iran fait débat :
Faut-il laisser
l’Iran maîtriser la bombe ?
Pour certains
c’est un facteur de stabilisation au Moyen-Orient, l’obtention de la bombe
nucléaire par l’Iran permettrait d’établir un
nouvel équilibre de la terreur régional.
Pour d’autres
c’est un facteur de déstabilisation, laisser faire l’Iran aboutirait à donner à
des islamistes la puissance nucléaire. Ensuite, cette évolution provoquerait
une prolifération régionale par effet « domino » nucléaire :
Syrie, Arabie Saoudite, Lybie, Algérie.
Le caractère
diffus du terrorisme international fait apparaître les limites de la dissuasion
nucléaire classique dans ce domaine.
Cependant, il
fait imaginer une autre forme de menace nucléaire ; celle que ferait
courir des groupes terroristes s’ils parvenaient à se doter d’une bombe sale (
bombe dont l’objectif est moins la destruction massive que la pollution et la
contamination).
Enfin, le
développement de nouvelles bombes nucléaires plus petites ( mini-nuke) fait craindre
à certains la possibilité d’un passage d’une « théorie de la
dissuasion » à une « théorie de l’emploi » ( autrement dit ces
armes étant moins destructives, elles pourraient être utilisées dans un conflit
conventionnel ou comme ultime avertissement)
Cl : la
dissuasion nucléaire reste donc d’actualité même si de nouveaux enjeux
apparaissent.
Conclusion
générale :
Même si la
dissuasion nucléaire est envisagée avant les premiers essais, la force de
démonstration en fait une arme de dissuasion après Hiroshima et Nagasaki. Cette
volonté de dissuasion est partagée par d’autres puissances. S’entame alors une
véritable course à l’armement ouverte à un nombre restreint de pays jusqu’en
1967. Cependant, la crainte d’un affrontement et les menaces de prolifération
horizontale poussent à la réglementation. Si la prolifération verticale est
contrôlée. L’apparition de nouvelles puissances et de nouvelles menaces fait
apparaître de nouveaux enjeux.